En partenariat avec l’association LIBrE, la galerie Lillebonne accueille l’exposition « Mémoire rêvée d’Afriques » du photographe William Ropp.
Lorsque l’on entre dans la galerie Lillebonne, des dizaines de regards intenses se plantent instinctivement sur nous. Comme si les sujets des photographies regardaient le visiteur et non l’inverse. Saisissant.
L’exposition « Mémoire rêvée d’Afriques » révèle le talent du photographe lorrain William Ropp dans l’art du portrait. Une trentaine de clichés principalement issus de ses voyages en Éthiopie : « Les quelques noir & blanc viennent du Mali et du Sénégal. À chaque fois, je fais trois voyages dans chaque pays » explique-t-il. Ses envies d’Afrique, William Ropp les puisent dans son enfance au fil de ses lectures des livres d’aventures africaines de Louis Jacolliot. Et vers l’âge de 40 ans, il se lance : « J’avais l’impression de tourner en rond dans mon studio. J’avais l’envie de me confronter à d’autres choses. Je voulais aussi savoir si la relation que j’arrive à instaurer avec les gens de ma culture pouvait être transmissible à d’autres personnes d’autres cultures. »
Il parcourt le nord, le sud, l’ouest de l’Ethiopie, jusqu’à la frontière sud soudanaise « où peu de gens veulent s’y aventurer ». Il y rencontre nombre d’individus différents, tant au niveau de leurs physionomies que dans leurs manières de se vêtir. Il raconte avec passion ses aventures : « Cette photo du pêcheur est incroyable. Depuis le matin, il n’attrapait rien. Je lui ai demandé de jeter haut son filet pour prendre cette photo. Ce coup de filet lui vaudra un poisson tigre de 80 centimètres qui lui paiera sa journée. »
Uthiopie avec Philippe Claudel
Dans ses territoires où les populations ne voient que quelques hommes blancs par an, William Ropp arrive à sublimer ses sujets avec une simplicité déconcertante. « On ne parle pas la même langue, alors, tout passe par le regard. J’aime les gens, je pense qu’ils le ressentent au travers de mon attitude. J’ai une relation presque hypnotique avec eux, instinctive. » D’habitude excellent dans le noir & blanc, Ropp s’essaie ici à la couleur « pour ne pas se répéter, se surprendre, pour aller plus loin dans la recherche ». Mais finalement, la couleur est volontairement épurée. Ici quelques touches de marron et de vert, ici de rouge. Son travail se fait essentiellement au niveau de la lumière qui attire l’œil sur un point précis. « Cette jeune fille, je l’ai choisie parmi un groupe de gamins sur la route. Tout de suite, mes yeux sont attirés vers elle. Un an plus tard, on repasse dans un endroit qui, pour moi, est différent mais qui ne devait pas être loin finalement. Un groupe d’enfants sort de l’école. Là, une fillette me crève les yeux. C’était la même que l’an passé. Ça a été un moment très émouvant pour nous deux. »
D’abord dans le milieu du théâtre, William Ropp se fait connaître en tant que photographe grâce à ses portraits déformés par des miroirs. « L’une des premières personnes que j’ai photographié était Gary, le peintre nancéen » se souvient-il. Aujourd’hui, il expose à l’international.
De ses clichés africains, il en a fait un livre : Uthiopie, en collaboration avec l’écrivain Philippe Claudel. « Nous nous sommes rencontrés en prison lors que l’on donnait des cours à Charles III. Il aime la photographie et m’a proposé d’écrire des textes en écho à mes photos. Il a fait un incroyable cadeau à mon petit éditeur. » Un travail présenté à l’occasion de la dernière édition du Livre sur la Place que les visiteurs peuvent retrouver à la galerie Lillebonne jusqu’au 15 décembre prochain.
Galerie Lillebonne 4 rue du cheval blanc à Nancy • Ouverte du mardi au samedi de 14h à 19h • Pour contacter William Ropp : [email protected]
Photos © William Ropp, DR