Le jeune patron tétraplégique de Clair de Lorraine, a fait de sa passion pour la gastronomie du terroir une entreprise florissante.
J’ai été témoin du formidable appétit de vie de Vincent Ferry lors de notre rencontre. Très jeune, il voue un intérêt pour les produits du terroir. En 1994, il effectue un stage dans le cadre de son cursus par le Centre Consulaire de Formation-CC2A de Laxou au sein de l’entreprise Clair de Lorraine, à Void-Vacon, que son gérant veut céder. Vincent Ferry poursuit : « La passion était si forte que j’ai décidé, un pari fou, de racheter la société. » Suivi par une banque, à 24 ans, le voilà à la tête d’une PME de 5 salariés au chiffre d’affaires de 800 000 euros, cherchant des artisans, modernisant le concept de nouvelles boutiques. Clair de Lorraine met sur le marché la crème de mirabelle. Un carton auprès des consommateurs.
Ambassadeur du terroir
Tout s’enchaîne comme un grand bonheur. Le mariage avec Sophie puis la naissance de Pierre-Alexandre apportant la félicitée au sein d’un couple pétillant. Et ce 29 mars 2008. Vincent Ferry effectue une virée à moto. Un trou sur la route. Coup de frein. La moto retombe sur le dos de son pilote. Compression de la moelle épinière. Vincent Ferry est tétraplégique (paralysé des quatre membres). Sur son lit d’hôpital, ses premiers mots vont, par un message enregistré, à son personnel : « Je ne vous laisserai pas tomber. » Entouré de l’amour des siens, il puise dans d’immenses ressources de courage. Clair de Lorraine s’installe à la même époque dans des locaux plus grands, ZAC de la Pelouse, à Void-Vacon. « Mon capital humain, ce sont mes capitaux propres. » Vincent Ferry a fait sienne cette maxime. En 2011, Clair de Lorraine, c’est 50 salariés, 10 millions d’euros de CA, 15 boutiques (dont une à Paris) comme autant de lieux de dégustation et de régal, regroupe 50 artisans producteurs, distribue 270 produits labellisés de qualité et 500 références, commercialisés en grande distribution, dans son réseau « En Passant par la Lorraine… », en France et au delà, sans omettre la vente en ligne sur son site. Vincent Ferry aime à trouver des associations de produits surprenantes : « Tout se décide en équipe. Pour le pastis et la mirabelle, j’étais sceptique. Mais le public a adoré. » Il exprime, en fin connaisseur, cette affection pour une gastronomie qui régale les papilles entre vins, bières et alcools traditionnels, boissons sans alcool, biscuits, friandises, chocolat, confiserie, terrines et plats cuisinés. Dernière réussite en date : le sirop de jonquilles. La mirabelle est bien sûre reine au centre de ce palais des gourmands sans oublier les perlés, savoir faire bien ancré dans les traditions.
Un nouveau défi
Depuis quelques mois, Vincent Ferry s’est ajouté un autre challenge : contribuer à changer le regard sur le handicap, par des rencontres, des témoignages, notamment auprès des chefs d’entreprise et des milieux économiques, signant récemment une convention avec la Banque Populaire de Lorraine – qui lui avait fait confiance en 1996. Récemment, Clair de Lorraine a reçu un prix d’apprentissage pour la formation de Laurine Bernard. Vincent Ferry me fait remarquer les petits dessins ornant les plaques de son bureau et de celles de ses collaborateurs : « C’est tellement plus sympa ainsi… ». Il me fait visiter la réserve aux 2000 palettes, là où 100 000 colis partent en fin d’année. Nous nous quittons sur une dernière poignée de main. Il m’adresse un sourire puis s’éloigne. Le succès de Clair de Lorraine est d’abord celui de ce jeune patron, porté par des valeurs humaines solides, une authenticité réelle, et une conviction à tracer sa route. Malgré tout.
Clair de Lorraine • 03 29 89 80 00 • www.clairdelorraine.fr