Acteur, metteur en scène, Michel Didym, le directeur du Théâtre de la Manufacture défend plus que jamais la création, les auteurs contemporains…et une certaine liberté de ton.
C’est entre deux répétitions des « chroniques d’une haine ordinaire »de Pierre Desproges, pièce qu’il met en scène et qui ouvre la saison 2011-2012 du théâtre de la Manufacture, que Michel Didym nous accorde cet entretien. « Ce sont des textes,inédits, très bien écrits, violents aussi. Pierre Desproges avait ce respect de la littérature et une liberté de ton difficile à imaginer. Aujourd’hui j’ai l’impression qu’il y a une certaine part d’auto-censure chez les artistes, alors peut-être qu’inconsciemment avec ce spectacle je me libère ! » Une pièce forte qui donne le ton de cette saison, la première dans une « Manu » réinventée après 14 mois de travaux. « Ce nouveau théâtre va nous permettre de travailler sans entraves, l’acoustique est meilleure et la scénographie sera plus lisible .» Ces mots sont ceux d’un acteur et d’un metteur en scène, et justement comment, pourquoi a-t-il choisi cette voie ? L’art est semble-t-il dans les gènes familiales, puisque son frère Eric photographe, mène une carrière internationale. « Je viens d’une modeste famille de cheminots, après j’ai eu la chance d’avoir des professeurs intéressants, je me souviens de Monsieur Reimer, mon professeur de mathématiques, devenu député puis sénateur. Il m’a permis d’avoir de l’ambition, de trouver une façon d’être et de me l’approprier .» Il débute le théâtre adolescent, à Blainville-sur-l’eau, au sein d’une troupe « le théâtre de l’étoile » , des amateurs, certes, mais passionnés.
Diffuser les auteurs vivants
« Nous étions d’une très grande exigence et passions l’intégralité de nos week-end à répéter des œuvres contemporaines. » Il intègre ensuite le conservatoire de Nancy avant de réussir, en 1981, le concours d’entrée au Théâtre National de Strasbourg, alors au faîte de sa réputation. « Pendant ces trois années, j’ai eu de grands professeurs, j’ai eu notamment la chance d’être dirigé par Jean-Pierre Vincent qui fut ensuite administrateur de la Comédie Française. » Et pourquoi la mise en scène ? « Cela me permet d’assumer un responsabilité artistique et sociale, de ne pas attendre que le téléphone sonne… d’être acteur de ma vie. » C’est ainsi qu’il enchaîne ensuite les projets, de la mise en scène d’opéras en Allemagne, à la création de pièces françaises au Japon, il adapte et publie en Chine des auteurs français issus de ses « Moussons d’ été ». Qui une semaine durant accueillent, chaque été, des artistes et auteurs dramatiques venus de toute l’Europe. Puis viendront les années passées entre la France et l’Amérique Latine, où missionné par les ministères des Affaires étrangères et de la Culture, il travaille pour la diffusion des auteurs vivants . Il crée en 2006 à Buenos Aires le festival « Tintas frescas », les encres fraîches, durant lequel des troupes Chiliennes, Mexicaines Colombiennes donnent des représentations. Il met en scène « La nuit juste avant les forêts » de Bernard-Marie Koltès, ou encore « El divan », vingt petits textes d’auteurs mexicains joués par 20 acteurs au Pérou. Il en profite également pour repérer des auteurs qu’ils invitera à ses Moussons d’été, « de belles rencontres bâties autour d’un projet généreux, l’idée était de leur ouvrir une porte . Rien n’existait là-bas dans le domaine de la diffusion des auteurs vivants, même si ce fut contraignant en raison des nombreux voyages, ce fut une aventure intéressante .» Il revient finalement à Nancy où il reprend la direction du théâtre de la Manufacture en 2010 quand Charles Tordjman prend sa retraite. Mais les voyages ne lui manquent-il pas ? « non je travaille à l’organisation du prochain festival Ring et à mes mises en scène… je suis content de me poser », avoue-t-il dans un sourire. Il est vrai qu’il y a d’innombrables moyens de voyager…