Martine Cassar : « On n’existe pas sans le regard des autres »

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Invitée d’honneur du festival Camille Claudel cette année, Martine Cassar travaille la terre et se mesure à deux autres éléments, l’eau et le feu, pour modeler ses sculptures. Installé à Wildersbach en Alsace, son atelier dissimule des trésors de poésie où nature et douceur fleurissent. Du 9 au 17 mai, elle expose ses créations à La Bresse et ouvre généreusement les portes de son univers. Rencontre.

À quoi va ressembler cette exposition à La Bresse ?

Comme à mon habitude, je pars vraiment dans toutes les directions. Souvent, quand je finis une sculpture, je suis déjà sur la suivante. J’ai tellement d’envies et d’idées… La vie est trop courte pour les réaliser toutes ! Pour cette exposition, je n’ai pas suivi de piste de travail à proprement dit, ni voulu forcer une unité de thème ou de style. Au départ, on m’a demandé une pièce sur la gourmandise et au final j’en ai fait deux. Pour le reste, il y a tout ce qui constitue mon monde, tout ce que j’aime réaliser.

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Quel est votre rapport à la sculpture ?

J’ai toujours sculpté. Toute petite, je modelais déjà la terre. Cette passion m’habite donc depuis longtemps. Mais il y a une différence entre travailler pour soi et mesurer ses créations au regard des autres. J’ai eu beaucoup de mal par rapport à ça. En 1997, j’ai démarré mon activité et au début je ne faisais que de la vaisselle. Puis, de plus en plus les gens me demandaient de faire de la sculpture à part. Alors je me suis lancée et j’ai composé des décorations pour le jardin. Le regard des gens m’inquiète toujours mais le jour où je n’aurai plus ce stress je ne créerais plus rien. Les artistes n’existent pas sans cela.

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Comment travaillez-vous la terre ?

J’utilise les techniques de cuisson du raku et du grès. Celle du raku me met vraiment au contact avec le feu et j’aime énormément ça. Il y a parfois un côté un peu « pyromane » chez les céramistes (rires) : on travaille tout au bord du feu. En l’occurrence ici, les pièces sont chauffées à 1000 ° Celsius puis posées dans des copeaux. Cela créé un choc thermique. À ce moment-là tout ce qui n’est pas émaillé noircit. Comme mes sculptures sont très fines, je suis obligée de les retirer du feu avec un journal mouillé. En revanche, le grès permet de faire des pièces plus solides, souvent mises à l’extérieur. Techniquement, elles sont plus difficiles à exécuter car la matière entre presque en fusion.

Quelle est la ligne directrice de toutes vos créations ?

Beaucoup de choses m’inspirent. La nature est une grande source de création pour moi. J’ai vécu pendant vingt ans dans les Vosges. Je suis aussi très attirée par l’Art Nouveau et l’École de Nancy. J’ai visité Barcelone et vu ce que faisait Gaudí. Tous ces éléments me donnent des idées pour des sculptures et notamment celles de jardin. Je façonne aussi beaucoup d’animaux et créé des personnages pour m’amuser. Et puis avec les pièces fissurées ou abîmées, j’ai créé un jardin de sculptures ouvert au public. Cet espace n’est pas grillagé ou clôturé et du coup, ça appartient un peu à tout le monde. Les visiteurs peuvent ainsi s’approprier mes créations.

Retrouvez les sculptures de Martine Cassar sur son site : afleurdeterre.net