À cœur d’opéra

451

À l’opéra de Nancy, la fin de la saison approche. Derrière les ors de la scène, techniciens, costumières ou machinistes s’affairent pour mettre en place le bouquet final : « Le médecin des fous », de Giorgio Battistelli. Parmi eux, Danièle Didierlaurent et Serge Gachet sont deux vétérans. À quelques semaines de la retraite, ils reviennent sur leur parcours et partagent leur passion pour leurs métiers.

Serge Gachet fait rocker l’opéra

Serge Gachet, directeur technique de l’opéra de Nancy, n’est pas un nostalgique : il vit dans le présent. Toujours en mouvement, il est à peine posé pour cet entretien, que déjà la sonnerie de son téléphone rugit au son d’une Harley Davidson. Il faut dire qu’en trente-trois ans passés dans cette maison, il n’a jamais trouvé l’occasion de s’ennuyer.

D’air en air

D’abord rentré comme machiniste en 1981, Serge Gachet a ensuite gravi tous les échelons jusqu’à la direction technique. « On ne peut pas zapper l’expérience de terrain ; c’est un métier qui se fait sur le tas. Je gère toutes les équipes techniques : accessoiristes, habilleuses, électriciens, machinistes. En plus, à l’opéra de Nancy, on a notre propre atelier de construction de décors et d’accessoires. On doit s’adapter, passer d’un domaine de compétence à l’autre », raconte-t-il. L’opéra, il y est entré par hasard, après onze ans dans l’industrie automobile au poste de mécanicien. À vingt-huit ans, il voulait « changer d’air » : il est passé du son des machines aux envolées lyriques et symphoniques.

Dans un train d’enfer

Plus que les spectacles, Serge Gachet retient surtout les rencontres avec des personnalités diverses du monde du spectacle vivant. De l’artiste de scène au créateur de décors et metteur en scène, il a appris de chacun. À quelques semaines de son dernier jour, il est encore dans l’action : les préparatifs de la pièce finale de la saison, un opéra de Giorgio Battistelli. « La retraite, j’y pense sans y penser. Pour moi ce n’est pas la cessation d’une activité », assure-t-il. Serge Gachet ne regarde pas dans le rétroviseur. Et s’il quitte l’opéra, c’est dans un « train d’enfer » au son d’une Harley Davidson. Toujours en mouvement, vers une autre destination..

LM29-035

Danièle Didierlaurent, la passion des histoires

À 60 ans, Danièle Didierlaurent a passé les deux-tiers de sa vie dans les ateliers de couture de l’opéra de Nancy. Au départ, elle se voyait vendeuse ; une toute autre voie s’est esquissée pour elle. Son CAP en poche, elle part à l’usine où elle fabrique des pantalons, puis des prototypes de robes de mariée.

La passion d’une vie

À l’âge de 20 ans, elle pénètre dans l’univers mystérieux et magique de l’opéra. « Le premier jour, j’ai ressenti une sacrée émotion. Pour moi qui venais de la campagne vosgienne, c’était une découverte totale. L’opéra est devenu la passion de ma vie », décrit-elle.   Depuis trente-deux ans, elle est la chef de l’atelier couture. Elle gère la fabrication des costumes, de l’échantillonnage des tissus à la recherche de coupes, et collabore avec les metteurs en scène et costumiers. « Voir nos réalisations portées sur scène, avec la musique et les décors, est un véritable émerveillement », précise-t-elle.

Un plongeon dans l’histoire

Danièle Didierlaurent s’intéresse à l’histoire de France depuis son enfance et cela lui a été utile dans la création d’habits pour l’opéra. « Je me souviens notamment de ma collaboration avec Rudy Sabounghi, un scénographe et costumier égyptien, pour la Traviata. Rudy est très précis avec les détails historiques. La pièce se passant sous Napoléon III, j’ai dû réaliser des crinolines, qui structuraient les jupes, avec des vrais cercles de métal », raconte-t-elle. Son dernier jour à l’opéra, Danièle Didierlaurent le fêtera avec ses collègues. Un dernier au revoir avant de tourner une page de son histoire. La chef costumière a déjà imaginé sa retraite : « profiter de mon mari, de mes enfants et petits-enfants ». Un programme tout en dentelle.ent de partage.