L’art contemporain est une fois de plus mis en lumière au Musée des Beaux-Arts de Nancy qui invite Mad Meg dans une exposition temporaire jusqu’au 31 janvier.
« Feast of Fools ». 8,70 mètres de longueur sur 1,50 mètre de hauteur. Cette œuvre est monumentale et elle est signée Mad Meg. Elle fait désormais partie de la collection permanente du Musée des Beaux-Arts de Nancy. « Cette pièce n’est pas simplement exceptionnelle à admirer, elle a aussi une histoire particulière : elle n’a jamais été vue par l’artiste quand elle l’a créée car elle travaillait sur des lés d’1m50, petit à petit. Elle l’a découverte lors de sa première exposition » détaille Anne Richard, commissaire de l’exposition et fondatrice de la revue HEY ! modern art & pop culture avec laquelle Mad Meg collabore. L’artiste a travaillé six ans sur ce projet. Elle qui dessine à la plume et à l’encre de chine sur des grands formats a commencé par conceptualiser l’œuvre. Point de départ : La Cène de Léonard de Vinci. « Les personnages sont ici transformés par des “Patriarches” : des insectes déguisés en homme, récurrents dans mon travail. » Et par-ci, par-là, une multitude de références : Le Caravage, Dominique Ingres, Andy Warhol… « Chacun, selon sa culture et ses connaissances, trouvera et interprétera ce qu’il voit. C’est ce qui m’intéresse. »
Regard satirique sur notre société
Mad Meg est une artiste pour le moins engagée. Sa grande influence est l’univers de Jérôme Bosch. Elle se réapproprie les tableaux fondateurs de la culture académique occidentale, dans lesquels elle ajoute un discours conscient et référentiel : le féminisme, le développement numérique, les grands procès… tous ces thèmes d’actualité se retrouvent dans ces œuvres. « Lorsque je dessine quelque chose sur le bitcoin, je n’y connais rien mais je me renseigne en lisant des articles, en allant à des conférences… » explique-t-elle. Mad Meg devient alors une incroyable artiste, dans le geste technique, mais aussi une mine de connaissances. Dans sa série Le Tartare, à découvrir dans la salle Galilée du musée, la dessinatrice expose son regard satirique sur notre société : l’une des pièces baptisée Satan trismégiste représente les dirigeants de Facebook, Twitter et Instagram sous la forme de Satan tel que décrit dans l’Enfer de Dante. « On les voit se nourrir de nos datas, puisés directement de nos cerveaux pendant que nous sommes distraits par des memes, lol cats, buzz et fake news. » L’artiste s’est aussi récemment intéressée à la crise des gilets jaunes avec une pièce inédite, sobrement intitulée Le martyre des gilets jaunes.
L’œuvre de Mad Meg est aussi constituée de tableaux autobiographiques comme celui de Margot l’Enragée qui s’inspire de la peinture Dulle Griet de Pieter Brueghel l’Ancien : « En langue flamande, Dulle Griet signifie “Margot l’enragée”, d’où l’artiste tient son nom, “Mad Meg” en anglais. C’est un personnage de mégère si redoutable que même les démons fuient en l’apercevant ! » s’amuse Mad Meg. Cet autoportrait fait aussi figure de manifeste pour l’artiste se prénommant dans le civil Marguerite : soit la revendication d’un caractère rageur comme moteur de création.
Pauline Overney
Exposition « Margot l’Enragée » • Jusqu’au 31 janvier 2021 • Ouvert tous les jours de 10h à 18h, sauf le mardi • Tarifs : 7 €, 4,50 €, gratuit – 12 ans • Renseignements : 03 83 85 30 01 ou musee-des-beaux-arts.nancy.fr
Photos © P. O., Mad Meg, Musée des Beaux-Arts de Nancy.