C’est l’une des brasseries les plus connues de Nancy. Son cadre Art Nouveau lui vaut même une réputation bien au-delà des frontières de la Lorraine. Et pourtant, il s’en est fallu de peu pour qu’elle soit détruite. Présentation d’un haut lieu nancéien.
L’Excelsior est, à sa naissance, une brasserie (et non un café) car elle ne servait quasi que de la bière, exclusivement produite par la Brasserie de Vézelise. Un lien très fort qui explique beaucoup de choses.
La famille Moreau
La Brasserie de Vézelise appartient alors à la famille Moreau (qui racheta par la suite la Brasserie de Saint-Nicolas de Port et fit construire le bâtiment qui abrite aujourd’hui le Musée Français de la Brasserie). Au début du XXe s., plusieurs grandes brasseries de Lorraine ont alors déjà à Nancy des lieux de débits pour leurs propres productions. Louis Moreau réagit et décide d’ouvrir également sa propre brasserie, véritable fer de lance et vitrine des productions vézélisiennes. Le but de la Brasserie Moreau est clair : « afficher, dans un local de premier rang, notre marque et la qualité de notre produit ». La modification de l’hôtel d’Angleterre offre l’occasion rêvée : tout le rez-de-chaussée du nouveau bâtiment sera dévolu à une grande salle de brasserie. Cette salle est louée à l’hôtel. L’aménagement et l’organisation de la salle sont laissés à la discrétion de la Brasserie qui baptise déjà le futur établissement « Grand Café Excelsior ». Ce nom évoque à la fois l’excellence des bières de Vézelise et la supériorité évidente de la Brasserie. Excelsior veut d’ailleurs dire en latin « plus haut ». Le contexte économique est alors florissant, tant pour Nancy que pour la Brasserie de Vézelise. L’Ecole de Nancy est à son sommet… tout est réuni pour créer un lieu d’exception.
Un chef d’œuvre de l’Art Nouveau
Le lieu doit être à la mode. C’est donc le langage de l’Art Nouveau qui est adopté. On fait appel aux architectes Weissenburger et Mienville. Le mobilier est confié à Majorelle, Daum fournit les verreries des lustres, Gruber les superbes verrières. Presque 200 000 francs (amortis en 1919) sont nécessaires pour offrir aux bières de Vézelise l’écrin qu’elles méritent, mais quel écrin ! En outre, sa situation dans Nancy est centrale : face à la gare et à proximité du Nancy « moderne » : Banque de France, salle Poirel, Magasins Réunis, Chambre de Commerce, Université, Bibliothèque municipale… La salle est grande : 24 par 12 m, sans aucun pilier. La disposition intérieure est élégante tout en étant pratique. Les hautes banquettes offrent une intimité bienvenue aux clients. Elles sont toutes pourvues de porte-manteaux. Le pratique rejoint le beau. Le plafond s’orne de délicates fougères. La foule se presse à l’ouverture en février 1911. Les critiques sont unanimes : l’Excelsior est un « nouvel Olympe » offrant le « régal des yeux, le régal du palais, le régal du confortable, du luxe ». L’établissement est agrandi dans les années 1930. Jean Prouvé réalise d’ailleurs la très belle rampe d’escalier. Au palier, dans le marbre, les lettres MV rappellent les propriétaires : Moreau à Vézelise.
La renaissance
Dans les années 1970, l’Art Nouveau n’est plus à la mode. L’Excelsior apparait démodé. On consomme moins de bière en brasserie. En 1972, l’établissement devient restaurant. C’est l’époque aussi où se construit la tour Thiers, première de ce qui devait être le « Manhattan nancéien ». L’avenir est sombre… mais des Nancéiens se battent avec énergie pour sauver ce patrimoine.
L’Excelsior est classé heureusement en 1976. Onze ans plus tard, il est racheté par le groupe Flo qui entreprend une restauration exemplaire et lui assure une nouvelle jeunesse.
Brasserie Excelsior – 50 rue Henri Poincaré, Nancy • Du lundi au samedi de 8h à 0h30, le dimanche jusqu’à 23h. • www.brasserie-excelsior.com