Qu’on l’appelle le Grand-Théâtre, l’Opéra ou encore le Palais Hornecker, toutes ces appellations désignent l’Opéra-Théâtre place Stanislas, près de la Pépinière. Un immense vaisseau néoclassique finalement assez récent : il n’a pas cent ans !
Entendons-nous bien, si le bâtiment à moins de cent ans, la façade, elle, date bien du milieu du XVIIIe siècle, époque de construction de la place. Retour sur l’histoire mouvementée du bâtiment pour tout comprendre.
Le premier théâtre
Lors de la construction de la place Stanislas, un théâtre est construit. Il offre une vaste et belle salle située à l’emplacement de l’actuel musée des Beaux-arts. Hélas, tout en bois, le théâtre de la Comédie brûle entièrement dans la nuit du 4 au 5 octobre 1906. Que faire ? Reconstruire au même endroit ? La parcelle est étroite et les nouvelles exigences (pour la scène, les machineries) demandent davantage de la place. Nancy est en pleine expansion. Certains suggèrent de reconstruire l’opéra loin du centre historique. Scandale. Finalement, les lois de séparations des Eglises et de l’Etat de 1905-1906 offrent une solution aussi pratique qu’inespérée : le nouvel Opéra sera reconstruit en face, dans l’ancien Hôtel des Fermes, qui était depuis 1802 l’évêché de Nancy. La parcelle du tout récent ancien évêché a un avantage : elle est profonde.
Le concours
Un concours entre architectes est lancé. Plusieurs projets se distinguent, notamment certains dans le style Ecole de Nancy (comme celui d’Emile André qui a les faveurs des Nancéiens). C’est finalement celui de Joseph Hornecker (1873-1942), emprunt d’une majesté néo-classique, qui retient l’attention du jury. Il ne faut pas oublier que ce style est alors très en vogue à l’époque, autant que le style Art Nouveau. En outre, comme tout pastiche, il rassure.
La construction
Le chantier, bien que ralenti par la guerre, est l’une des premières utilisations à grande échelle à Nancy d’une structure tout en béton armé.
Le Théâtre est inauguré en grande pompe le 14 octobre 1919. On y donne Sigurd d’Ernest Reyer. Le public est conquis tant par les lieux que par la représentation.
La salle est grande : 1014 places. Elle accueille un parterre avec loges d’orchestre, un balcon, deux galeries et un poulailler. Progrès évident dû au béton : les balcons ne sont pas soutenus par des colonnes, ce qui évite les places aveugles.
Répondant aux standards de l’époque, il existe alors trois classes qui ont chacune leurs escaliers, leurs entrées… Si la première classe entre par la place Stanislas et jouit d’un superbe escalier de marbre, la troisième doit se contenter d’entrées latérales avec de petits escaliers à l’arrière.
L’Opéra fut entièrement restauré en 1994-1995. Cela permit de retrouver l’éclat des dorures et des soieries rouges qui tapissent les murs de la salle.
Des lieux d’exception
Le foyer est assurément l’un des endroits les plus éblouissants. Situé au premier étage et occupant toute la façade sur la place, il offre un lieu de rencontre du public lors des entractes. Baigné de lumière dans la journée, il resplendit le soir sous les multiples feux de ses lustres en cristal. Dans le décor de stuc, des masques ici et là rappellent la fonction de l’édifice.
Le bar oriental (aujourd’hui fermé) était le foyer des troisièmes classes. Le décor de ses carreaux de faïence est la seule référence à l’Art Nouveau.
Le Grand Théâtre continue aujourd’hui d’émerveiller ceux qui le visitent, mais il est surtout un magnifique écrin à l’Opéra national de Lorraine et à ses créations, car derrière les lourds velours et les stucs dorés, c’est surtout le lieu de vie d’artistes, de machinistes, de techniciens, d’habilleurs… bref, de la scène lyrique nancéienne.