La place de la Commanderie accueille des bâtiments à l’architecture hétéroclite, témoignage d’une histoire longue et riche, indissociable de la fameuse commanderie de l’Ordre de Malte.
Il faut bien l’avouer, la place de la Commanderie n’est -malheureusement- pas la plus belle place de Nancy. En pente (souvenir de l’ancienne butte où était érigée la Commanderie) et de forme irrégulière, elle se situe à la naissance de l’ancien étang Saint-Jean. Les bâtiments qui la bordent sont très hétéroclites et soulignent l’urbanisation récente du quartier. En outre, un rideau de cyprès coupe la place en deux : la jonction rue de Laxou / rue Saint-Lambert / avenue Foch d’un côté (bruyante et très passante), un parking un peu en contrebas de l’autre (plus calme). Faut-il couper les arbres pour redonner une unité à la place ? La question fit débat il y a quelque temps.
Les bâtiments qui bordent la place oscillent entre immeubles bourgeois, architecture éclectique (le fameux Hostel Saint-Lambert érigé en 1893 par l’architecte Lambert), tour moderne en briques de verre (bien connue, et qui accueille l’escalier du Kléber) et constructions en béton récentes qui attendent de l’avenir leurs lettres d’anoblissement. Il faut également citer la pharmacie de la place qui a su conserver la majorité de ses belles boiseries en chêne du XIXe s.
La tour de la Commanderie
Si elle n’est pas à proprement parler sur la place, la tour de la Commanderie domine et veille sur cet espace. Elle est, et ce n’est pas le moindre de ses mérites, le plus vieux monument de Nancy.
Avant toute chose, il faut préciser un point : on dit tour, mais il faut comprendre clocher. En effet, cette tour, dernier vestige de la très ancienne Commanderie de Saint-Jean-du Vieil-Aître qui appartenait à l’Ordre de Malte, est l’ancien clocher de la chapelle. Elle comprenait d’ailleurs deux cloches dont l’une, de forme cylindrique et au son aigre, était considérée comme la plus ancienne de Nancy. Elles furent toutes les deux victimes de la Révolution et de son appétit pour tout ce qui était en bronze.
La tour, qui date du XIIe s., a gardé son allure originelle. Ses murs, très épais à la base (plus d’un mètre !), accueillent cinq planchers reliés les uns aux autres par des échelles. Le rez-de-chaussée devait même servir, du temps de la chapelle, de sacristie. Cette tour dut également avoir par le passé un rôle de guet, du fait de sa position dominante.
La Commanderie de Saint-Jean-du-Vieil-Aître
Le nom de la Commanderie (et de la tour) vient à la fois de Saint Jean-Baptiste, patron de l’Ordre de Malte, et d’un vieux cimetière (l’ « aître ») mérovingien depuis longtemps disparu mais dont la population avait gardé le souvenir. Ce cimetière fut d’ailleurs redécouvert lors du percement de la rue des Goncourt en 1894-95. L’intéressant mobilier (broches, armes…) exhumé est aujourd’hui conservé au Musée Lorrain.
La Commanderie était autonome et bénéficiait de nombreux privilèges donnés par les ducs de Lorraine. Elle avait un hôpital à Laxou, un four rue des Maréchaux à Nancy, des champs, des dépendances dans les environs… Plusieurs bâtiments, connus par les archives, composaient cette possession de l’ « Hospital » : cellier, pigeonnier, dépendances et maison qui accueillait les chevaliers et le commandeur.
Démantelée à la Révolution, la Commanderie vit ses bâtiments disparaître les uns après les autres, faute d’entretien. Le coup de grâce fut porté à la fin du XIXe s. avec la destruction injustifiée de la chapelle. La maison qui la remplace tente de l’évoquer avec ses fenêtres ogivales.
La tour de la Commanderie se fait discrète dans un environnement devenu très urbain…mais elle mérite qu’on lui rende visite !