C’est ici que tout a commencé. Au premier étage de l’Imagerie, l’odeur de l’encre, les collections de casses d’imprimerie, les plaques en bois gravé vous rappellent que dès 1898, l’atelier Pellerin s’est installé en ces murs. Visiter l’imagerie, le pendant historique du musée voisin, c’est mettre un pied dans le passé de façon concrète. Car ici, on travaille encore. Seule imagerie d’Europe encore en activité, l’Imagerie d’Epinal est un lieu de création, de fabrication, un espace dans son époque.
Mais on y rentre par la porte de l’histoire. La hotte du colporteur vient expliquer comment les images d’Epinal étaient vendues dans les campagnes à un prix abordable afin que chacun puisse profiter d’une petite histoire, d’une leçon de morale ou d’une image pieuse. Du moule en bois limité à 300 tirages aux plaques en métal gravé dès 1820, le passage de l’artisanat à l’ère industrielle s’observe à travers l’histoire des images d’Epinal.
Dans la pièce attenante, on entre dans le vif du sujet avec les aquatypes, deux grandes machines à colorier acquises lors de l’exposition universelle de 1900. En autorisant jusqu’à 9 couleurs, elle a longtemps permis de faire briller la production à grande échelle. Aujourd’hui l’ambiance est calme, presqu’endormie. Mais au plus fort de l’activité de l’Imagerie, on comptait jusqu’à 200 ouvriers dans les ateliers. Après le bois et le métal, l’âge de pierre. Dans la troisième pièce on découvre le procédé plus connu sous le nom de lithographie. Par un procédé aussi simple qu’ingénieux, utilisant les propriétés du calcaire, de l’encre grasse, de la gomme arabique et d’autres petits secrets, elle a permis aux images de gagner en détails et en précision.
A chaque époque, son progrès. Mais au fil des siècles, l’Imagerie d’Epinal a pris soin de préserver chaque technique, même lors de l’apparition d’une nouvelle. C’est ainsi qu’aujourd’hui, elle peut s’enorgueillir d’être le conservatoire des techniques qui ont permis l’évolution de l’art de l’image.
Cette mémoire de l’entreprise a aujourd’hui un prénom : Françoise. Elle est l’une des trois employés encore en activité dans l’atelier. Depuis 42 ans, elle occupe le poste de coloriste et à ce titre, transmet les techniques et le savoir-faire d’un métier devenu rare. Ses pinceaux sont des grosses brosses rondes, sa peinture, de la gouache très diluée qu’elle applique au pochoir. Gardienne du temple, son poste de travail s’expose aux visiteurs, entre les salles du premier étage et la boutique.
Maintenir le savoir-faire et moderniser l’entreprise, tel est le but de l’entreprise Imagerie d’Epinal S.A. dans sa version contemporaine. Avec ses séries limitées d’artistes, elle renouvelle les collections. Les dernières sont un clin d’œil à la bande-dessinée avec des signatures telles que Joan Sfar. En ciblant l’imprimerie de luxe, en offrant ses techniques aux plus grandes marques, l’Image d’Epinal se présente ainsi comme un nouvel outil de communication. Mais au fil des siècles, n’est-ce finalement pas ce qu’elle a toujours été ?
Cité de l’image (musée de l’image et Imagerie d’Epinal), 42 bis Quai de Dogneville, 88000 Épinal.