Depuis 2004, le Pôle Bijou marie luxe et savoir-faire d’exception. L’exposition Rencontre présente les œuvres d’artisans, de joaillers, de pâte de verriers et de designers. A rêver sans modération.
Tout naît toujours d’une rencontre. Rencontre entre deux êtres, entre une idée et un artisan, entre un métal précieux et une pierre taillée, entre une envie et une réalisation. Le bijou est toujours le résultat d’une rencontre. La rencontre, c’est ce qui offre ce « plus » indéfinissable, cette dynamique qui a pour résultat la « naissance d’un nouvel élément, une extension de chacun des protagonistes, un entre-deux nouveau et unique… ». C’est le début d’un dialogue entre les différents acteurs. C’est aussi la nécessité d’écouter l’autre, de prendre en compte ses particularités, son « altérité ». Au final, la rencontre amène toujours, lorsqu’elle aboutit, à une découverte enrichissante.
A partir de là, il est difficile de savoir qui enrichit davantage l’autre. Où s’arrête l’influence et où commence la confluence ? C’est en ça que la rencontre est magique : son produit n’est jamais vraiment maîtrisable. Il y a une part évidente de hasard. Ce côté indomptable et vivant de la rencontre est d’autant plus vrai en bijouterie où le métal réagit en lui-même. La fusion apporte toujours une part d’incertitude, et finalement de merveilleux.
La rencontre au-delà de la technique
C’est l’alliance presque impossible : d’un côté le métal dur et froid (mais précieux et qui s’appelle or ou argent) et de l’autre la chaude sensualité de la pâte de verre, délicate et fragile.
C’est la rencontre entre un bijoutier-joaillier, Jacky Schwartz, et un magicien du verre trop tôt disparu : Daniel Briswalder (sa veuve a repris le flambeau).
Cette rencontre, c’est celle de deux autodidactes. Jacky Schwartz, à force de courage et de pugnacité, réalise son rêve de toujours : devenir bijoutier. Un apprentissage chez Michel Louis lui permet d’apprendre les différences ficelles du métier. Son inspiration, il l’a trouve dans l’Ecole de Nancy. Il poursuit avec modernité ce mouvement dont il est l’un des dignes représentants actuels. Loin de copier, il perpétue le style tout en intégrant l’évolution de notre monde actuel. Comme il aime à le rappeler, « cet héritage artistique n’a jamais fini de livrer tous ses secrets ». La qualité de ses créations est vite reconnue, et depuis 1999, année de l’Ecole de Nancy, les récompenses pleuvent.
Daniel Briswalder est aussi un pionner, mais du verre. La technique le passionne bien plus que la production. Doté d’une remarquable inventivité, il se forme avec Alain Cheval à la chimie du verre, en pâte ou gravé. Il explore toutes les couleurs, toutes les textures, toutes les techniques. Il retrouve des gestes oubliés. La pâte de verre est capricieuse. Daniel Briswalder fait preuve d’une patience incroyable pour l’apprivoiser. Ses efforts portent toujours sur de nouveaux défis à relever. Sous ses doigts, la manière prend vie. Chaque pièce devient unique. Il réalise de véritables prouesses, reproduit en pâte de cristal de très délicats champignons…
La rencontre de ces deux magiciens ne pouvait donner que de l’exceptionnel. Les fleurs de métal prennent vie avec des pétales de couleur. Les orchidées se réveillent sous le mariage de ces deux matériaux presque antinomiques. Chacun explore et repousse les limites des rêves de l’autre. Au milieu de tout cela, une profonde amitié se noue.
La rencontre au-delà de la culture
Les rencontres se font aussi par-delà les mers. C’est le cas de celle d’Aude Durou, designer, et des artisans nigériens d’Agadès.
L’Afrique, Aude Durou est tombée dedans toute petite, en suivant son père, photoreporter passionné de nomadisme. Sa culture a toujours été double : Europe-Afrique. Comme elle le rappelle, elle s’est « forgée entre deux mondes : vie sédentaire – vie nomade, désert – ville, tradition – modernité ». Les échanges, les rencontres sont naturelles pour cette messagère des cultures qui s’est formé au design textile.
C’est aussi une formidable aventure humaine. En effet, depuis les terribles sècheresses des années 80, l’artisanat est, à Agadès, la principale source de revenus des nomades. Si le travail de l’argent est l’apanage des hommes, les femmes brodent, tressent, teintent, transforment le cuir… Ainsi, plus qu’un simple travail d’exécution, la ligne de bijoux Ombre Claire présentée à l’exposition raconte les échanges entre les dessins d’Aude Durou et les œuvres achevées. Au cours de la fabrication, les formes sont adaptées, modifiées, re-dessinées au cours des rencontres. L’œuvre devient commune ; elle devient le fruit d’un partage, d’une communauté. Les cultures se mélangent, les références se croisent, les inspirations se brouillent. Les bijoux évoluent et racontent une histoire, où chacun peut – en plus – inscrire la sienne. Par ces rencontres, les œuvres d’Aude Durou dépassent le simple statut de bijou. Elles deviennent des porteurs d’espoir, des vecteurs de culture.
Les bijoux sont intimes. Nous les portons souvent à même la peau, au plus près de nous. Leur choix en dit souvent long sur nos goûts, nos histoires, nos caractères. On se les transmet de générations en générations. On les garde jalousement. Parfois aussi on s’en sépare. Finalement, l’achat d’un bijou, c’est le fruit d’une rencontre, d’une émotion, d’un partage. L’exposition du Pôle Bijou est riche en ce sens. Elle nous éclaire tout en nous faisant découvrir de véritables talents. A ne pas manquer !
Pauline JOLAIN
Exposition Rencontre, jusqu’au 28 novembre 2012.À NOTER
Le Pôle Bijou s’attache à promouvoir et faire découvrir les créateurs contemporains du bijou. Qu’ils expérimentent de nouveaux matériaux, de nouveaux usages ou ramènent au goût du jour des techniques anciennes et traditionnelles, les créateurs présentés sont tous des acteurs de la création actuelle qui s’inscrivent dans de multiples courants artistiques.
C’est l’occasion de découvrir et comprendre les inspirations de ces artisans-magiciens, dont les œuvres trouvent toujours un écho en nous.
Pôle Bijou Galerie, 13 rue du Port, 54120 Baccarat
www.polebijou.com