Jusqu’au 31 août, la municipalité et la CUGN vous invitent à découvrir au Palais du Gouvernement une superbe exposition consacrée à la ville de Nancy et à son incroyable transformation sous Charles III. A visiter sans aucune modération !
Emballés, nous avons été emballés. Si si, il faut le dire, surtout lorsque c’est vrai. L’exposition « La ville révélée » est l’une des meilleures jamais consacrées à Nancy, notamment à sa ville neuve et à son urbanisme.
Le Palais du Gouvernement
Depuis que l’Armée est partie, beaucoup s’interrogent sur le devenir du palais. La réponse est simple : il est intégré au périmètre du futur nouveau Musée Lorrain. Y avoir installé « La ville révélée » est d’ailleurs une manière de le signifier de manière forte. Ce va être aussi pour nombre de visiteurs l’occasion de découvrir l’intérieur de ce palais finalement mal connu, et même si les meubles ont été temporairement retirés, les scénographes ont volontairement créé des cimaises basses afin que chacun puisse admirer les riches décors des salons du premier étage. La sobriété quasi monacale de ces premières contraste de manière assez heureuse avec la richesse dorée de ces derniers.
Le plan de 1611
Claude de La Ruelle, 1611. Retenez bien ce nom et cette date, car ils sont la clef de l’exposition. En 1611, Claude de La Ruelle grave un magnifique plan de la ville de Nancy, d’une précision redoutable. En effet, selon la mode de l’époque, les maisons et immeubles sont représentés en perspective cavalière. Les visiteurs attentifs reconnaitront d’ailleurs sans peine certains édifices toujours présents en ville. En outre, La Ruelle émaille son chef d’œuvre de scènes animés : ici des chevaux buvant ou étant lavés dans les deux gayoirs de la ville (l’emplacement de l’un d’eux est rappelé, en Vieille-Ville, par la Cour du fossé aux chevaux), là des habitants jouant à la paume (ancêtre du tennis).
Ce plan est d’autant plus précieux qu’il est le premier à représenter la capitale du duché de Lorraine de manière exacte. Bref, vous l’aurez compris, pour qui s’intéresse à l’histoire de la ville de Nancy, c’est une Bible !
Charles III
Evoquer le plan de La Ruelle ne peut se faire sans évoquer Charles III, l’un des plus grands ducs de l’histoire de Lorraine. Pour deux raisons. La première est La pompe funèbre de Charles III. Quesaco ? Eh bien, lorsque Charles III meurt en 1608, la Lorraine connait un âge d’or incroyable. Ses funérailles sont l’occasion d’une cérémonie imposante et fastueuse, à la pompe majestueuse. Tout ce que le duché compte de nobles, de congrégations religieuses, d’universitaires, etc. y participent. Pour commémorer cette cérémonie grandiose, on grave sur plusieurs planches toute la procession, en prenant soin d’identifier dans les légendes les différents protagonistes. Une sorte de Point de Vue avant l’heure. A la fin du recueil est insérée la fameuse carte de La Ruelle. Pourquoi ? Parce qu’elle vante la réalisation majeure de Charles III : la création de la Ville-Neuve à partir de 1588, qui est la seconde raison.
Charles III et Ville-Neuve sont indissociables. C’est pourquoi la mairie a récemment rebaptisé la place du marché du nom du fameux souverain.
Maquette et projection virtuelle
C’est un fait, et beaucoup l’auront noté, Nancy a bien changé entre 1611 et 2013. Outre une urbanisation galopante (le nombre d’habitants a quand même bien augmenté !), l’une des différences majeures est la suppression des fortifications. Comment alors comprendre que Nancy était qualifiée, grâce à elles, de plus belle ville d’Europe au XVIIe s. ? C’est là tout l’intérêt de l’exposition. Images de synthèse, maquette, reconstitutions permettent de se replonger dans ce début du XVIIe s. et de comprendre le Nancy d’alors. Les bastions et leur impressionnant décor de briques vernissées noires disposées en losanges (comme sur la porte de la Craffe ou sous la porte Saint-Georges) et de chaînage de pierres blanches retrouvent vie.
La maquette présentée dans le grand salon permet de parfaitement saisir les proportions des fortifications. La plupart des bastions (ces avancées en forme de pique, qui répondent à une évolution de l’artillerie) ont une superficie de 3 ha ! Mesurant 3,40 m par 3, la maquette a nécessité pas moins de 4 500 heures de travail. Elle permet en un coup d’œil de comprendre le plan de la Ville-Neuve qui reste, près de 400 ans plus tard, très fonctionnel avec ses rues larges et aérées. Il ne faut jamais oublier qu’une grande partie du centre de Nancy que nous connaissons actuellement (rues Saint-Dizier, Saint-Jean, Saint-Georges) est née à cette époque.
La représentation virtuelle est « bluffante ». On survole les fossés, les rues, les nombreuses églises d’alors… On reconnait les espaces qui deviendront la future place Stanislas, on aperçoit trois maisons au nord qui donneront leur nom au faubourg… on plonge véritablement au cœur du Nancy de 1611 !
Cette exposition mérite votre visite car elle vous donne les clefs de Nancy. On comprend son urbanisme, une partie de son architecture, son patrimoine. On comprend également l’évolution de la ville : sans la ville de Charles III, la place Stanislas n’aurait jamais existé ! La Renaissance est un des maillons les plus importants de l’histoire nancéienne.
En créant la Ville-Neuve, Charles III voulait faire de Nancy une ville « civilisée et heureuse ». Avec le recul, on être peut-être finalement pas si loin de ce bel objectif.
L’accès est libre et gratuit.Que reste-t-il des fortifs ?
Des fortifications de Nancy, il reste des portes : Craffe, Citadelle, Saint-Georges et deux éléments de bastions : le bastion Vaudémont, qui sert de parking près de la Pépinière, et une portion du bastion d’Haussonville, au sous-sol du Musée des Beaux-Arts. Ces derniers ne datent pas de Charles III. En effet, après avoir rasé les fortifications lorraines en 1661, les Français décident de les reconstruire dix ans plus tard. Ils chargent Vauban de ce projet, qui s’appuie sur les bases des murailles de Charles III. Au passage, elles perdent leur beau traitement décoratif.