Les 5, 6 et 7 avril prochains, la Lorraine met à l’honneur les professionnels des métiers d’art avec 236 manifestations, de l’ouverture d’atelier à l’exposition. Pour chaque département lorrain, découvrez un artisan d’art, un métier et un savoir-faire particuliers. Portraits de ces personnalités, entre tradition et modernité.
En Meuse : Géraldine Duriaux, artiste verrier
Il y a un peu de peinture dans les sculptures de Géraldine Duriaux. L’œil attentif peut y retrouver au choix les couleurs fauves de Vlaminck ou de Matisse : bleu outremer, vert opaline, rouge grenat ou jaune miel. Les œuvres qu’elle crée s’observent par petites touches comme la toile d’un peintre impressionniste. Tantôt fuyantes, tantôt caressantes, le regard ne peut jamais complètement les capter. « Quand je réalise une pièce, il faut qu’elle dégage toute une richesse. Je peux jouer à la fois sur les volumes et les couleurs. Et chacune se révèle différemment selon la lumière », raconte l’artiste verrier. Les modèles de ses sculptures, elle les a à portée de regard dans son atelier de Vertuzey, près de Commercy. Le chat, son animal fétiche, se promène ici en plusieurs exemplaires. La sculptrice prend plaisir à saisir dans le cristal les « positions incroyables » de ses compagnons. « J’aime sculpter le mouvement, et les chats sont souples, tout en courbes », explique-t-elle.
Un processus long et douloureux
Et ce mouvement, il est restitué grâce au procédé utilisé par Géraldine Duriaux. Comme Daum, elle s’appuie sur l’utilisation de la technique de la pâte de verre. Un verre spécial et précieux composé d’oxyde de plomb : le cristal. Avant d’être enfermées dans une gangue cristalline, les formes sculptées sont ébauchées dans de la cire. Cette cire sert ensuite de base pour effectuer un moule, dans lequel les morceaux de verre colorés en fusion viendront s’écouler. Les dernières interventions de l’artiste sur sa création : refroidir la sculpture, la polir pour lui donner un aspect mat ou brillant. Mais pour l’artiste verrier, créer est un processus long et douloureux : la sculptrice produit seulement deux à trois belles pièces par an. Le prix de la perfection.
Géraldine Duriaux29 Rue de la Chapelle
55200 Vertuzey
03 29 89 00 67 – 06 45 89 35 00
[email protected]
www.geraldine-duriaux.fr
En Meurthe-et-Moselle : Benjamin Berceaux, relieur
Tordu, déchiré, usé, la vie d’un livre se révèle parfois plus difficile qu’il ne semble. Ces blessures, le relieur est seul à pouvoir les guérir. À Pagny-sur-Moselle, où il s’est installé en 2009, Benjamin Berceaux a transformé son atelier en clinique. Comme un médecin soulevant un pansement, il doit être patient et précis : débrocher, nettoyer les résidus de fil ou de papier, recoudre ensemble les multiples cahiers à l’aide de fil de lin et de chanvre… Point par point, organe par organe, le recueil est rendu à sa forme initiale. « La restauration nécessite de la part du professionnel une connaissance historique des matériaux et des structures de chaque époque. Il faut savoir réfléchir au protocole de restauration le plus approprié avant de se lancer », décrit-il.
Le livre comme œuvre d’art
Son livre professionnel renferme plusieurs chapitres. Dans le premier, il remet à neuf les ouvrages. Dans le second, il aime transformer ces objets quotidiens en œuvre d’art. Il utilise notamment la technique de « hot stamping », une impression à chaud qui lui permet d’apposer sur une surface (cuir, papier, bois…) des « pigments métalliques colorés ». Sa création « Le miroir du philosophe » exprime ce lien entre tradition, art et technique. Ici le livre se transforme en accordéon, révélant par moment les écrits dissimulés à l’intérieur. Les couvertures, en cuir de chèvre incrusté de laiton, en sont l’écrin. À travers ce travail, Benjamin Berceaux montre son amour pour cet univers fait de papier, de lettres et d’idées. Son métier, il le voit ainsi : « Le travail du relieur ressemble parfois à celui d’architecte. Tout n’est qu’une question de tension, d’épaisseur, de matière qui interagissent et se répondent ». Benjamin Berceaux, relieur, médecin, architecte et poète.
Benjamin Berceaux6 avenue Théophile Brisson
54530 Pagny-sur-Moselle
06 74 37 54 91
[email protected]
www.reliureberceaux.fr
Dans les Vosges : Fabienne Higel Mailliard, lissière et restauratrice de tapisseries
Fabienne Higel Mailliard dit travailler ses créations comme un peintre. En réalité, l’œil de la photographe n’est jamais loin. Pour concevoir son carton, dessin servant de repère pour tisser, elle se base souvent sur ses propres clichés. Cette double compétence, la lissière la doit à sa formation aux Arts Décoratifs de Strasbourg. « Là-bas, les élèves avaient l’obligation d’avoir une autre spécialité. J’ai pris la photographie. Pour commencer, je me base sur une prise de vue en noir et blanc et c’est seulement après que j’ajoute la couleur », détaille-t-elle. Cette particularité confère aux pièces qu’elle tresse un aspect graphique très moderne, renvoyant presque au street art. En observant « le Cheval », une de ses premières œuvres, il est facile de s’y tromper et de la confondre avec un mur peint à la bombe aérosol.
Une trame après l’autre
Mais la création n’est qu’une part infime de son activité. Son métier à tisser, bien souvent, lui sert à restaurer des tapis ou tapisseries anciennes. Fabienne Higel Mailliard a par exemple aidé à la renaissance d’une « Verdure aux oiseaux », vieille dame de plus de trois siècles, fabriquée à la Manufacture Royale d’Aubusson. Ici la difficulté est de redonner l’éclat premier de l’œuvre. « Selon l’origine de la tapisserie, je connais les points et techniques à utiliser. J’ai un stock de laines anciennes mais il m’arrive de ne pas avoir la bonne nuance. Dans ce cas, je prends des brins de laine très fine, que je mélange pour trouver le ton initial ». Il lui arrive aussi de teinter elle-même les fils dont elle se sert pour les tapisseries en soie. Un métier de patience et de précision, à faire pâlir la mythique Pénélope.
Les 5, 6 et 7 avril 2014, Fabienne Higel sera présente au château de Lunéville avec d’autres professionnels de la restauration d’art de l’ARAP (Association des Restaurateurs d’Art et du Patrimoine).
Son atelier est situé à Épinal.
Moselle : Louise Corseret, costumière
Louise Corseret est tombée par hasard dans la création de costumes. À la fin de ses études, aux Beaux-Arts de Nancy, elle rencontre une bande d’étudiants du conservatoire. Ils sont en train de monter une compagnie, préparent un spectacle. Elle se lance dans la réalisation de leurs tenues. La voilà prise au piège. Depuis elle a posé ses valises à Metz, collabore avec des compagnies de théâtre, de danse et touche même au septième art. Son métier demande des talents de psychologue : discuter avec le metteur en scène, les comédiens, comprendre les personnages et leur créer une seconde peau de tissus et de fil. Les croquis, elle les rectifie plusieurs fois avant de passer au patron puis au modelage de l’habit sur un mannequin.
Voyage dans l’imaginaire
Pour elle, toute la magie de son métier est là : « partir d’une idée, la poser sur le papier, pour la voir enfin prendre vie sur le corps des comédiens, des danseurs, sous les lumières de la scène… ». La création de ces vêtements recèle une autre part d’illusion. Il faut donner au public l’impression du réel. Pour « l’Histoire du cinéma », une web série réalisée par l’association nancéienne Red Screen Films, elle doit recréer les panoplies de figures mythiques du cinéma, comme Gandalf du « Seigneur des Anneaux » ou Obi Wan Kenobi de « Star Wars », et les rendre aussi vrais que les originaux. Mais tous ses costumes sont comme des papillons : leur vie est éphémère. Ils brillent le temps d’une représentation, puis retournent dans leur papier de soie attendant la prochaine. Pour Louise Corseret, le spectacle continue loin des projecteurs. Il y aura d’autres voyages dans l’imaginaire, d’autres personnages à rencontrer et encore bien des costumes à créer.
Les 5 et 6 avril, Louise Corseret sera à la manifestation « Au fil des métiers », de 10h à 18h. 3 rue des Trinitaires à Metz.
Les moments forts des JEMA en Lorraine
Moselle
À Metz, l’exposition « Au fil des métiers », en collaboration avec l’association Carrefour, rassemblera des costumières, créateurs de mode, peintre sur textile… tous ces professionnels qui utilisent le fil dans leur activité.
3 rue des Trinitaires – Metz
Vosges
À Saint-Dié-des-Vosges, la Nef déroule le tapis rouge aux femmes artisanes d’art de la région : tailleuses de pierre, ébénistes, brodeuses…
« ArtisanE » à la Nef
64 rue des 4 Frères Mougeotte
Saint-Dié-des-Vosges
Meuse
Dans la Chapelle Sainte Geneviève, à Saint-Maurice-sous-les-Côtes, quinze artisans d’art exposent des créations représentant leur idée de ce que sont les Côtes de Meuse. La Chapelle, restaurée avec une facture moderne, est un point de départ pour découvrir les ateliers d’art à proximité.
Meurthe-et-Moselle
À Nancy, au palais du Gouverneur, deux calligraphes, Stéphane Alfonsi et Bastien Grelot proposeront des ateliers et des démonstrations de calligraphie.Place Carrière – NancyPour plus d’informations sur les Journées Européennes des Métiers d’Art et le programme complet des manifestations :
www.journeesdesmetiersdart.eu
www.metiersdart-lorraine.eu