Le FIG 2024 en Terres des Alpes

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Le Mont Blanc vu des lapiez du Parmelan, Dingy Saint-Clair, Haute-Savoie © Pierre Rich

Les 4, 5 et 6 octobre, la 35e édition du Festival International de Géographie (FIG) traitera des « Terres » et explorera les Alpes, territoire invité.

Installé depuis 35 ans à Saint-Dié-des-Vosges, le FIG réussit l’exploit d’être un grand barnum savant et une fête populaire mettant la géographie à la portée de tous. Ce festival parmi les plus importants du Grand Est rassemble géographes, chercheurs, écrivains, illustratrices, enseignants et passionnés autour de grands enjeux contemporains. Trois jours durant, il décline une programmation exigeante accessible gratuitement. Et s’il fait appel à notre cerveau, le FIG n’en oublie pas de titiller nos sens en multipliant les invitations culturelles et ludiques, gastronomiques et familiales ! Objectif de l’ADFIG, l’Association pour le Développement du FIG : nous étonner, nous informer, nous rassembler autour de constats tangibles, de données éprouvées, à l’antithèse des fake news et autres petits complots qui essaiment volontiers sur la toile.

Le FIG s’articule autour d’une thématique et d’un territoire, généralement d’un pays ou territoire invité. Cette année, « les terres » seront au centre des débats, tandis qu’après le Portugal en 2022 et le Chili en 2023, les Alpes feront figure de territoire fil rouge.

« Explorer les distinctions et relations entre terres, sols et fonciers, voilà l’intention de cette 35e édition », résument de concert Florence Nussbaum et Adrien Baysse-Laine, respectivement directrice et directeur scientifiques 2024. L’exploitation du sol et son urbanisation, l’aménagement du territoire, la pollution et la construction, la végétalisation des sols et leur nécessaire préservation, les acteurs, usages et régulations des terres… Multidimensionnelle et objet politique par excellence, la terre donnera lieu à des échanges, des accords et des oppositions ; elle sera l’objet de démonstrations brillantes et de conversations passionnantes.

Quant aux Alpes, elles seront regardées pour ce qu’elles sont : une chaîne de montagnes traversant 8 pays et l’un des massifs montagneux parmi les plus reconnus au monde (et le premier à être invité du FIG), l’espace de coopérations transfrontalières, un haut lieu du tourisme dans un contexte de baisse de l’enneigement, de déprise rurale et de crise agricole. Les Alpes, ou le territoire idéal pour penser et préparer les transitions auxquelles nos sociétés sont confrontées.

© FIG
© Élodie Grégoire

Gaspard Koenig pour Président

Philosophe et romancier amoureux de nature, Gaspard Koenig est un penseur nomade : il arpente les chemins pour clarifier sa pensée. Auteur d’une douzaine d’essais et de romans, il a récemment publié « Humus » (aux Editions de l’Observatoire), histoire de terre et d’hommes récompensée du Prix Interallié et du Prix Jean Giono 2023.

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Le FIG, terre de dialogue

« Les Terres » infuseront divers temps forts, parmi lesquels des conférences, tables rondes et rencontres.

Vendredi 4 octobre à 18h, prérogative du président, Gaspard Koenig donnera le traditionnel « grand entretien inaugural », animé cette année par Emilie Aubry, rédactrice en chef de « Les dessous des cartes » (Arte).

Plus tôt dans la journée, Eméralda Longepee (géographe) et Denis Mercier (géomorphologue) évoqueront les terres « submergées, asséchées, dégelées » et dans tous les cas « transformées » par le changement climatique. La table ronde « Les terres agricoles, entre convoitise et partage » amènera Pierre Blanc, professeur de géopolitique, Carine Pachoud, géographe et Coline Sovran, chargée de plaidoyer, à explorer les terres du point de vue de leur concentration aux mains d’investisseurs ou entreprises privées et des initiatives déployées en réaction. Plusieurs intervenants experts échangeront autour d’une problématique résolument actuelle : le « Zéro artificialisation nette », objectif posé aux collectivités locales par la loi Climat et résilience. Simultanément, Fabrice Argounes, Martine Drozdz, géographes, et Laurent Carroue, de l’IGESR, se rencontreront autour de « Nos Lieux communs » (Editions Fayard), ouvrage explorant le monde à travers 100 lieux banals à exceptionnels. Et tandis que le speed-meeting géographique (voir entretien ci-après) aura débuté à La Boussole… au Cinéma Empire, Monique Poulot, géographe, Christian Huyghe, directeur scientifique Agriculture à Inrae, Eric Fottorino, écrivain et journaliste et Hélène Béchet, coordinatrice territoires et collectivités à Terre de liens débattront d’un thème d’avenir : « Quelle agriculture en France en 2050 ? ». Enfin « Les Alpes, terre sauvage » mettra en évidence, via une table ronde dédiée, un début de prise de conscience face à la fragilité des milieux et paysages alpins.

Samedi 5 octobre, Aude Le Gallou, géographe, Guillaume Hebert, architecte-urbaniste et Anne Delos, fondatrice Ma Friche Urbaine, s’interrogeront sur l’avenir des friches urbaines. Autre table ronde, autre question posée (et à « reposer sans cesse ») : « Où atterrir ? ». Ou comment retrouver, face au réchauffement climatique et aux crises écologiques, un rapport pérenne à nos terres et territoires. La table ronde « Ce que les terres cachent… et qu’on sait révéler ! » nous promet quant à elle une pluie de révélations fracassantes. Quant à celle intitulée « Quelles coopérations entre les métropoles et les territoires qui les entourent ? », elle réunira Claire Delfosse, géographe, et Thierry Paquot, essayiste et philosophe. Ils s’attarderont ensemble sur les grandes villes et leurs périphéries, ce qui les sépare et ce qui les rassemble. Les Alpes seront au cœur de plusieurs moments d’échanges dédiés aux « recompositions du tourisme alpin » et aux Alpes « face au changement climatique ». Ce même jour, il sera question de « racines au pied des immeubles » (soit l’agriculture en ville) et de Blue Marble Obsession (performance suivie d’un débat) par Michel Lussault.

Dimanche 6 octobre, le temps de « Promenons-nous dans les bois… de qui ? », Jean-Yves Boitte, chef du service forêt à l’ONF, François Schouver, enseignant en Gestion forestière et Roger Perrin, président de Forestiers Privés des Vosges, auront la lourde tâche de décrypter les évolutions et usages de la forêt française. Réunis pour « Mettre le passé en cartes », Dominique Garcia, président de l’INRAP et archéologue, Christian Grataloup, « le plus historien des géographes » (et grand témoin du FIG 2024) et Anne Lacambre, directrice littéraire, analyseront les dessous des cartes géographiques de l’Antiquité à nos jours. Enfin « Collectivité locale cherche terres pour sa transition agroécologique » s’intéressera, en compagnie de Mazarine Girardin, doctorante en géographie, de Coline Perrin, géographe et de Thibault Valois, directeur du syndicat mixte Multipole Nancy Sud Lorraine, aux difficultés que rencontrent les collectivités locales pour mener à bien la transition nécessaire.

© FIG

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Entretien avec Thibaut Sardier, Président de l’AFDIG et géographe

Le FIG s’enrichit d’une nouveauté : le speed-meeting géographique. En quoi consiste-t-il ?

Chaque festivalier ou festivalière va pouvoir rencontrer un ou une géographe au hasard, qui lui expliquera pendant quelques minutes sa passion pour la géographie et sa façon de travailler, l’importance de son sujet d’étude, et ses expériences sur le terrain. Nous avons choisi de mélanger les profils, avec des géographes jeunes ou plus aguerris, qui étudient la France ou des pays bien plus lointains, qui font carrière dans la recherche ou qui ont bifurqué vers d’autres métiers… Ensuite, pendant cinq à dix minutes, il ou elle répondra à toutes les questions possibles.

Quel est l’objectif ?

L’idée, c’est de faire découvrir la grande diversité des sujets auxquels s’intéresse la géographie, très souvent en lien avec l’actualité et des problématiques brûlantes (écologie, aménagement du territoire, agriculture…). Et permettant un échange direct et convivial, nous espérons que les personnes qui participeront trouveront des réponses aux questions qu’elles se posent. C’est donc une façon nouvelle de diffuser le savoir, mais aussi de nouer des liens de confiance entre le grand public et les scientifiques. 

« Protéger les terres », livre manifeste écrit pour cette édition, réunit 1 géophysicien et 6 géographes, dont vous-même. Quelle thèse y défendez-vous ?

Cet ouvrage résume la réflexion qui a guidé l’élaboration du festival. Comme l’écrivent les directeurs scientifiques du FIG 2024, Florence Nussbaum et Adrien Baysse-Lainé, nous assistons aujourd’hui au grand retour de la terre : tous les débats sur la « bétonisation » des sols, l’agriculture, la biodiversité, la sauvegarde de la forêt, et j’en passe, mettent au centre les terres et l’usage que l’on en fait. Et pourtant, on ignore encore beaucoup de choses sur leur fonctionnement et sur la vie (parfois microscopique) qui s’y déploie. Pour préserver les terres, il faut se demander qui les possède, qui décide de ce qu’on peut y faire, et quels modes de gestion peuvent être inventés pour qu’elles répondent aux besoins essentiels de tous les humains (se nourrir, se loger…) et permettent de sauvegarder la biodiversité, sans être dégradées ou détruites. 

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Des livres enracinés

Événement dans l’événement, le salon littéraire du FIG se démarque par la présence de nombreux auteurs et éditeurs. 

© FIG

Devenu, en 35 ans d’existence, la plus grande librairie de géographie de France, le Salon du Livre Amerigo Vespucci donnera lieu à des rendez-vous de formes variées, entre remises de prix, master class « Quitter la terre, prendre le large » avec Emilie Aubry) et rencontre consacrée aux « défis de l’Europe » (avec Pierre Haski, Sylvain Kahn et Edwy Plenel).

Solennels et conviviaux, les grands entretiens mettront tour à tour en lumière : l’auteur/réalisateur lorrain Philippe Claudel, le journaliste Pierre Haski, Allain Bougrain Dubourg, président de la LPO, l’écrivaine Sandrine Colette, Edwy Plenel et Frédéric Encel.

Pour sa Carte blanche, Christian Grataloup discutera avec Pierre Lena, astrophysicien, autour de leur œuvre commune : « Atlas historique du ciel » (édition Les Arènes). Autres temps forts annoncés : la lecture-discussion qui rassemblera Gaspard Koenig, Fabrice Argounès et Martine Drozdz sur le thème « Cheminer dans la géographie », ou encore la table ronde qui amènera Philippe Rekacewicz, cartographe-géographe, Chloé Rosner, chercheuse en histoire, et le journaliste Dominique Vidal à analyser les racines des conflits au Proche-Orient.

L’œuvre et l’itinéraire d’Elisée Reclus (géographe, anarchiste, exilé volontaire et philosophe) seront au cœur d’une rencontre entre Gaspard Koenig, la géographe Martine Drozdz et le mathématicien Cédric Vilani. Raphaël Confiant discutera avec Michael Roch, écrivain, et Valérie Marin la Meslée, autrice et journaliste, de la « poétique Martinique ». Naidra Ayadi, actrice césarisée, donnera lecture de « Confidences tunisiennes » (Gallimard) de Marie Nimier.

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3 questions à Anne-Solange Muis, Autrice

Votre premier roman, Une île pour elle, a reçu le prix Amerigo Vespucci 2024. Que ressentez-vous ?

Une grande joie, évidemment ! Je suis très attachée à la géographie. C’est elle qui m’a appris à regarder le monde, à comprendre ce qui m’entoure, à m’intéresser aux relations homme/nature et à l’écologie. Je suis d’autant plus heureuse qu’Une île pour elle sera probablement mon roman le plus géographique. En effet, il traite de l’attachement, du lien à une terre, de la façon de « faire territoire ». L’île n’est pas un support ou un prétexte pour la fiction, c’est un personnage tout aussi important que Louise ou les oiseaux.

Que vous inspire « les Terres », thème de cette édition 2024 ?

La Terre avec un grand T qui réunit toutes les autres ! J’aimerais que l’homme arrive à s’attacher à la Terre comme il y parvient avec sa maison, son jardin ou son village. Si seulement, on comprenait que notre « chez soi » ne s’arrête pas à un bout de terrain et que nous avons la responsabilité de la Terre tout autant que celle de notre propriété… !

Vous vivez entre Paris et le monde. Comment choisissez-vous vos destinations ?

Je vis entre Paris et mon monde… Le voyage n’est pas une question de destination mais d’attitude, de relation, de regard… Je voyage loin uniquement pour mon travail (de géographe). En ce moment j’accompagne, avec l’agence Métamorphoses Urbaines, les habitants de Miquelon dans la relocalisation de leur village face à la montée des eaux. Une vraie source d’inspiration pour un prochain roman.

Suite à la remise du prix Amerigo Vespucci samedi matin, Anne-Solange Muis présentera son livre à 15h15 à la Boussole.

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Les cinq sens en éveil

Au programme du FIG, des rencontres, des livres… mais aussi des spectacles, des concerts, des expositions et de la gastronomie !

© Anthony Sion

Spectacle, concert et cinéma-rencontre seront au programme de la soirée du vendredi 4 octobre. En la Cathédrale, l’ensemble de cors des Alpes Cors et Accords mettra à l’honneur un répertoire alpin constitué de sonneries traditionnelles et de chants des montagnes. Au Musée Pierre-Noël, Olivier de Sagazan s’emparera de l’espace (la salle François Chloé) pour livrer Transfiguration, performance basée sur un surmodelage du visage et du corps avec de l’argile. Une carapace qui permet à l’artiste de muter en direct, ses différentes identités se révélant à mesure que les masques tombent et se succèdent. Enfin, le Cinéma Excelsior projettera « Nous serons toujours là ! Plogoff 1980 », en présence de son réalisateur et producteur Nicolas Guillou.

Samedi à 10h dans La Nef, Gadoue, par la Cie Le Jardin des Délices, invitera le public à s’installer autour d’une piste recouverte de boue blanche. Au centre, un jongleur doit enchaîner des figures de plus en plus complexes sans salir son complet veston, et sans lâcher sa balle. En résulte un spectacle tout public et pas correct, qui encourage les plaisirs défendus en stimulant le frisson de l’interdit. À 19h, au sein de la Boussole, Des jardins et des hommes nous embarquera dans l’histoire de l’écologie. Guidée par Allain Bougrain Dubourg, Abdelghani Benhelal et le pianiste Patrick Scheyder, cette balade musicale convoquera Léonard de Vinci, Victor Hugo ou encore George Sand. À 20h, les sœurs Malaka s’empareront du Chapiteau des Grands Moulins pour y présenter leur univers folk et soul.

Dimanche à 11h, STRATES.360 (Cie En Lacets) racontera la rencontre entre la Danse et les Sciences, le Mouvement et la Montagne, sous forme d’un dialogue chorégraphié entre le public, Apolline Lefort (géologue), Maxime Boubay (musicien) et deux danseurs. A 16h, Border Line (Cie de l’Athanor) mettra en scène deux clowns cherchant (et trouvant) un endroit pour construire leurs maisons respectives. Un spectacle qui questionne, de manière on ne peut plus concrète, le thème sensible de la frontière.

© Border Line

Gastronomie et expositions

L’édition 2024 du FIG signe également le grand retour des démonstrations culinaires, volet marrainé par la cheffe vosgienne Lorraine Pierrat. L’idée ? Régaler le public à coup d’innovations d’avenir et de processus responsables. Au menu, des recettes 100% terriennes composées de : pâtes aux figues, tarte à la myrtille, dhal de lentilles, pain perdu salé, risotto de crozets au lard vosgien, cocktails flambés et brunch 0 gaspi et maxi savoureux.

Enfin, au volet expositions, citons Hautes pierres, une genèse perpétuelle, dont les clichés sont signés Pierre Rich. De l’Inde aux Vosges et un peu partout en France, elle retrace deux décennies passées à explorer les magnificences de la pierre, témoin quasi inaltérable de nos atermoiements humains.

© FIG
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Publireportage - Photos © Fig, Pierre Rich,  Elodie Grégoire, Vincent Lappartient, Anthony Sion, Border line, DR