La merveilleuse cité d’or !

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Tous les deux ans à Gérardmer, le mois d’avril est rythmé par la Fête des jonquilles. La 49e édition est en cours de préparation et promet des souvenirs teintés d’or à tous les visiteurs.

À quelques semaines de l’événement, la ville de Gérardmer est en ébullition. Au siège de la Société des Fêtes, tout le monde s’active pour les derniers préparatifs. Car cette année, le jour J est fixé au 7 avril. Nicole Curtit, la présidente de la Société des Fêtes depuis 19 ans, manage son équipe avec passion : « Je prends toujours autant de plaisir à organiser la Fête des jonquilles. J’habite à Gérardmer depuis 40 ans maintenant, je me sens complètement Gérômoise ! Après avoir fait beaucoup de bénévolat, notamment au Fantastiqu’art, vous savez ce que c’est… on choppe le virus ! » Nicole Curtit découvre la Fête des jonquilles dans les années 80, pour l’anniversaire de sa fille. « Une révélation », pour elle. Elle intègre la Société des Fêtes en 1996 et ne la quittera plus.

Pourtant, le succès de la Fête des jonquilles n’était pas une évidence. L’histoire raconte qu’à chaque printemps, la jonquille envahit les coteaux de Gérardmer. Au départ, les agriculteurs font la chasse à cette fleur qu’ils pensaient toxique pour leurs bêtes.

Un événement devenu culte

La première Fête a lieu le 22 avril 1935 lorsque les membres de l’Amicale motocycliste gérômoise ont l’idée de décorer leurs bécanes avec les fleurs jaunes. Une voiture ouvre le cortège diffusant des airs joyeux dans ses haut-parleurs, suivie de chars en forme d’immense poisson, de bouteille de champagne géante, de moulin à vent, d’œufs de Pâques, de cygnes ou de papillons. La première Reine des jonquilles, Andrée Houssemand est élue en 1936, devant une foule de spectateurs enthousiastes. La manifestation connaîtra un coup d’arrêt pendant la guerre, entre 1940 et 1946.

Les Vosges sont abîmées, meurtries. Mais les organisateurs ne baissent pas les bras. En 1958, lors de l’Exposition Universelle de Bruxelles, une tour Eiffel de 17 mètres habillée de jonquilles s’invite sur la place des Déportés. Le président de la République Georges Pompidou, en 1972, vient se mirer dans son portrait de fleurs jaunes. Lors de ses 50 ans, en 1985, la Fête des jonquilles rend hommage aux Etats-Unis en créant une statue de la Liberté, habillée de jaune, de plus de 15 mètres de haut. À Gérardmer, l’événement est devenu culte.

18 formations musicales

La 49e édition de la Fête des jonquilles marque ses 82 ans. Et elle n’a pas pris une ride ! « Cette année, nous restons sur le schéma classique qui fait sa renommée » détaille Nicole Curtit. « Elle rassemblera 31 chars et 18 formations musicales qui viendront animées le défilé. » Il y en aura pour tous les goûts : du militaire, du celtique, des bugga… pour plaire à tous ! « C’est un travail de recherche de longue haleine. On privilégie cette année les groupes de plus de 50 musiciens pour proposer un événement qualitatif aux visiteurs. » Pour en citer quelques-uns, la Fête des jonquilles accueillera les Allemands de Highland Pipes and Drums, les Endiablés de Courtepin, Les Beuquillons des Vosges ou encore Le Marching Band Sans Pistons d’Eloyes. « Plusieurs groupes animeront également la soirée de piquage, la veille du défilé, pour donner du baume au cœur à toutes les personnes qui viendront nous aider ! »

50 000 bouquets de 50 jonquilles 

Mais avant de penser à la décoration des chars, les jonquilles doivent être cueillies. Cette lourde tâche est confiée aux élèves du canton. Ce travail titanesque leur demande près de trois jours d’efforts. Les 1 500 enfants sont aidés de nombreuses associations, de Gérômois et de bénévoles pour réussir à cueillir les 50 000 bouquets de 50 jonquilles nécessaires ! « Lorsque l’on sait qu’un mètre carré de grillage contient 2 500 jonquilles… ces petites mains nous sont indispensables ! » souligne Nicole Curtit.

À ce jour, 1 359 chars ont déjà été construits depuis la création de la Fête. À 14h30, le 7 avril prochain, les 31 chars prendront la direction du centre de « la Perle des Vosges » pour un parcours de 2.5 kilomètres. Entre 50 000 et 60 000 spectateurs, venus de toute la France mais aussi des pays frontaliers, sont attendus pour cet événement, devenu la fierté dorée de toute une ville.

Renseignements et réservations : 03 29 63 12 89 ou societe-des-fetes-gerardmer.org • Tarifs : 15 €, gratuit pour les moins de 10 ans. Supplément à prévoir pour les places assises sous réserve de places disponibles.

3 questions à Nicole Curtit

Présidente de la Société des Fêtes de Gérardmer

À un mois de la 49e Fête des jonquilles, comme vous sentez-vous ?

Je me sens fébrile, comme toute l’équipe ! Préparer un événement comme celui-ci ne se fait pas en un jour, on court partout ! Nous avons organisé le bal de la reine le week-end dernier, c’est déjà une bonne chose de faite. C’était une très belle soirée à l’Espace LAC. Mais nous avons encore tellement de choses à faire ! Les réunions avec tous les intervenants, les dossiers à finaliser, je dois aller choisir les robes avec la reine et ses dauphines…

La cueillette des jonquilles s’annonce bien ?

Oui, les jonquilles ont pointé le bout de leur nez il n’y a pas très longtemps, c’est de bon augure pour la suite ! Et comme chaque année, ce seront les enfants, accompagnés de leurs professeurs, qui iront cueillir les jonquilles. Cette année nous serons aussi aidés par des associations car il faut énormément de jonquilles… entre 40 000 et 50 000 bouquets de 50 !

Et nous organiserons « la fête après la fête », pour récompenser les enfants. Nous inviterons les élèves de chaque classe à assister à un spectacle gratuit, cette année il s’agira d’un mini-cirque. Les commerçants leur remettront une médaille et nous leur donnerons un CD avec toutes les photos qui ont été prises pendant leur cueillette pour leur laisser un souvenir ! 

Et en 2021, place à la 50e Fête des jonquilles…

C’est une date que nous avons tous en tête ! Bien sûr nous marquerons le coup, il faudra trouver la bonne idée. Mais pour l’instant, nous sommes dans l’organisation de l’édition 2019 que nous voulons la plus réussie possible. Nous avons déjà un excellent quota de réservation des places assises. Mais la 50e édition d’une fête comme celle-ci… ça se fêtera en grand ! Propos recueillis par Pauline Overney

Ophélie Coutret, reine de Gérardmer !

Le samedi 2 mars, à l’Espace LAC de Gérardmer, Ophélie Coutret a été élue Reine des jonquilles 2019. Un « rêve devenu réalité » pour cette jeune fille de 17 ans, encore lycéenne en Terminale scientifique. Pour cette Gérômoise pur souche, participer à l’élection de la Reine des jonquilles était une évidence : « Ma maman a aussi été Reine. Je pense que ce titre m’aidera surmonter ma timidité et à m’ouvrir aux autres. » L’élégance et le charme d’Ophélie, vêtue d’une longue robe rose poudré, ont séduit le public et le jury, par ailleurs composé de Stessy Speissmann, le maire de Gérardmer et de Claude Vanony (entre autres). Et lorsque Jérôme Prod’homme, l’animateur de la soirée, a demandé à la future reine son endroit préféré à Gérardmer, la jeune fille n’a pas hésité : « Le lac. Car en été comme en hiver, le paysage se transforme, c’est un endroit vraiment magnifique. »

À quelques semaines de la 49e édition de la Fête des jonquilles, Ophélie Coutret et ses deux dauphines doivent trouver leurs robes blanches pour le défilé et s’entraîner pour le jour J. « J’assiste à la Fête tous les deux ans. Savoir qu’aujourd’hui, je défilerai sur le char de la Reine, c’est très impressionnant ! » Et une fois l’événement passé, Ophélie Coutret devient l’ambassadrice de Gérardmer pendant deux ans. « J’ai hâte de découvrir ce qu’il m’attend ! C’est un honneur pour moi de représenter ma ville. »

La Fête des jonquilles 2019 en chiffres

31 chars 18 unions musicales 500 bénévoles

50 000 visiteurs attendus 2.5 kilomètres de parcours

686 500 euros de budget   

Les chars, ces stars !

Dans le hangar de la Société des Fêtes, plusieurs dizaines de carcasses de chars sont en construction. Prochaine étape avant le piquage : les finitions.

Chaque année, ils sont plusieurs centaines à mettre la main à la pâte. Étudiants, travailleurs ou retraités travaillent, ensemble, à l’élaboration des différents chars qui défileront pendant le Corso fleuri. Pierre Imbert, adjoint à l’urbanisme à la mairie, se souvient : « J’étais chef de centre des pompiers de Gérardmer et tout l’équipe de la caserne s’investissait dans la construction du char. Moi, j’avais une formation de chaudronnier mécanicien alors je soudais les armatures. Ce sont des beaux souvenirs, les chars sont toujours fabriqués avec beaucoup d’humour ! »

Il ne reste qu’un mois aux constructeurs pour finaliser leurs créations. Ce jour-là, Éric est à l’œuvre : « J’ai commencé ce char au mois d’octobre. Je venais tous les week-ends et maintenant, j’accélère la cadence pour être dans les temps ! On s’attaque aux finitions, c’est presque de l’art ! » Lui construit un immense coq pour la ville de Waremme en Belgique, jumelée avec Gérardmer. « Les habitants nous ont fait découvrir la chanterie du coq, un endroit où s’organisent des compétitions de chants de coq. Ce char est un clin d’œil et ils défileront à côté. » En plus des jonquilles, Éric utilise de la mousse, des feuilles et des copeaux de bois. Uniquement des matériaux végétaux, c’est la règle. « J’en suis à mon 11e char. Au début, je construisais avec des associations et on prend vite le pli ! Là, je le fais avec des copains, c’est toujours amusant ! » Pour son coq XXL (2,20 mètres de haut et 3,80 mètres de large), Éric aura besoin de 1 700 bouquets de 50 jonquilles.

Une histoire de famille

Après avoir fait défiler son effrayant « Volcan de Satan » en 2017, Alain s’est lancé un nouveau défi : « Cette année, je fabrique une licorne géante. C’est une idée de ma petite-fille, c’est tendance ! » Fort de plus de 30 ans d’expérience dans la construction des chars, Alain n’est pas à court d’idées. Pour la décoration, il est allé dans les campagnes autour d’Avignon et de Marseille pour ramasser des milliers de feuilles mortes aux teintes orangées, rougeâtres et violines. « Des couleurs que l’on ne retrouve pas dans les Vosges. » Et pour couronner le tout, Alain viendra déposer des ailes de 2.70 mètres de long sur sa licorne. « Une machine crachera aussi de la fumée pour faire croire qu’elle vole dans les airs ! Ma petite-fille défilera dessus et nous serons neuf, autour, avec des masques de licorne et une musique festive pour amuser les spectateurs ! » Dans le hangar, on distingue aussi un Spiderman plus vrai que nature, l’usine de Charlie et la Chocolaterie, un essaim  pour sensibiliser au plan de sauvegarde des abeilles…

La tradition de la construction de chars se transmet de génération en génération. Alain est admiratif de son petit-fils qui, du haut de ses 14 ans, a déjà fabriqué des sujets fixes sans l’aide de personne. Et déjà, il prévient : « Pour la 50e édition, on rendra hommage à Johnny Hallyday avec une énorme guitare. Ça va être explosif ! ». 

Entretien avec Stessy Speissmann

Maire de la ville de Gérardmer

Êtes-vous Gérômois ?

Je ne suis pas né ici mais j’ai vécu à Gérardmer depuis ma toute petite enfance. Et je suis maire depuis 2014.

Que représente la Fête des jonquilles pour vous ?

C’est une grande fête qui rassemble des dizaines de milliers de personnes. Il y a une ambiance conviviale, fraternelle. Chacun se met au travail ! Car, dès le samedi, tout le monde vient piquer les jonquilles dans les chars. Le jour-même, c’est une grande féérie colorée. Il y a une mise en avant d’un travail remarquable des constructeurs qui font preuve de minutie, d’imagination. Pour moi, c’est de l’art ! Ils sont capables de réaliser des chars extraordinaires, simplement avec du fil de fer et du grillage !

Combien de personnes sont accueillies à chaque édition ?

Si la météo est clémente, nous pouvons accueillir jusqu’à  60 000 personnes pendant le week-end. Vous imaginez ce que ça représente pour une ville comme Gérardmer de 9 000 habitants… !

Comment expliquez-vous le succès de cette manifestation qui a, bientôt, 90 ans ?

C’est une fête emblématique de Gérardmer ! Nous ne pensons pas à une autre ville lorsque l’on parle de jonquilles. La Fête a démarré très à la marge grâce à un groupe de motards et, petit à petit, elle a pris beaucoup d’ampleur. Il y a, je pense, une volonté de porter cette spécificité locale. Les différents présidents et présidentes de la Société des Fêtes ainsi que tous les bénévoles l’organisent, tous les deux ans, avec beaucoup d’entrain et de passion.   

Comment la Ville soutient la Société des Fêtes dans l’organisation de la Fête des jonquilles ?

La mairie offre un soutien matériel à la Société des Fêtes en mettant à dispositions ses infrastructures et également un soutien humain des services techniques. En termes d’heures de travail, de matériel mis à disposition, et au niveau de la mise en place également, nous chiffrons cela à 130 000 euros. 

C’est aussi une belle opération pour le tourisme à Gérardmer…

Beaucoup de visiteurs restent une journée ou juste le week-end. Mais comme la Fête des jonquilles coïncide avec les vacances scolaires, il y en a d’autres qui restent pour de plus longs séjours. C’est une excellente période pour les hôtels, les commerçants et les restaurateurs ! Les retombées économiques sont formidables. Mais au-delà de l’aspect financier, c’est le nom et la notoriété de Gérardmer qui sont portés ici grâce à la Fête. Notre ville est connue internationalement aujourd’hui car nous avons des bus venant de Belgique et de Hollande par exemple.

Vous avez des souvenirs d’enfance de la Fête des jonquilles ?

Pas vraiment, mais j’emmène mes petits-enfants à chaque édition et ils sont toujours surpris et ébahis par ce qu’ils voient ! Les chars, qui sont parfois gigantesques, les impressionnent beaucoup. Et l’ambiance festive avec la musique, les majorettes est très agréable pour toute la famille.

Les enfants sont  par ailleurs investis localement. Je pense notamment aux élèves de l’école des Bas-Rupt qui construisent un char cette année et qui défileront à côté. Il y aussi une tradition : ce sont les enfants des écoles de Gérardmer, accompagnés de leurs professeurs, qui vont cueillir les jonquilles en marge du piquage. Ça leur plait beaucoup.

Quels sont les prochains grands rendez-vous pour la ville de Gérardmer ?

Il y aura la saison estivale avec le feu d’artifice du 14 juillet et la « Féérie sur le lac » le 14 août qui regroupe, là aussi, plusieurs milliers de personnes.  Nous offrons également une belle programmation de spectacles gratuits (théâtre, musique…) durant tout l’été dans toute la ville lors de manifestation « Un été au bord du lac ». Et bien sûr, il y aura le MotorDay l’année prochaine, en alternance avec la Fête des jonquilles. Propos recueillis par Pauline Overney

Publi-reportage • Photos © Pierre Imbert, RD, DR