Jean Prouvé se met au vert !

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Nancy célèbre cette année l’un de ses plus grands artistes : Jean Prouvé.  Avec le 9e jardin éphémère, elle offre un dialogue audacieux entre le végétal et les formes majeures du designer.

Depuis 2003, année du premier jardin éphémère sur la place Stanislas, le succès ne s’est pas démenti. Les clefs de cette réussite ? De superbes végétaux, des compositions-créations sans cesse renouvelées, une remise en question permanente, un entretien impeccable… VivreNancy a voulu en savoir plus. Nous sommes donc partis à la rencontre de ceux qui se cachent derrière cette incontestable réussite : les hommes et les femmes du Service des Parcs et Jardins de la ville de Nancy.

Le Service des Parcs et Jardins

Si le nom fleure bon le temps jadis, il faut bien constater que ce service est à la pointe des innovations, notamment végétales. Il suffit de regarder les jardinières qui ornent les fenêtres du bâtiment de la direction, située parc Charles III, pour s’en rendre compte. Des fleurs étranges et curieuses, aux feuillages inconnus. Où est-on ! Les espèces végétales travaillées dans les serres viennent du monde entier, et c’est ce monde que l’on retrouve dans le jardin éphémère de la place Stanislas.

Jean Prouvé

Travailler le végétal pour rendre hommage au maître incontesté du métal pouvait sembler être une gageure. Il fallait transposer les œuvres du maître au végétal, partir de formes de construction chères à Prouvé comme le portique et le compas, et se souvenir que ces formes étaient, au départ, finalement aussi éphémères que le jardin qu’elles ont inspiré.
Le défi n’était pas simple, mais il a été relevé avec succès. Tout sur la place rend un hommage appuyé à l’une des plus illustres personnalités nancéiennes du XXe siècle. Les symboliques sont multiples : compas, hublots, chaise standard, éléments de façade…

Un travail d’équipe

Voilà une dimension que Jean Prouvé n’aurait pas reniée. Le jardin est l’œuvre de tout le service. Plus d’une soixantaine de jardiniers se sont activés pendant cinq jours pour installer cet hommage éphémère. La dimension humaine a également été renforcé par la présence d’un chantier d’insertion et des apprentis BTS 2e année de l’école de Roville qui, sur une partie réservée, ont participé à la conception du jardin. Le rouleau de calque, cher à Prouvé, est ainsi devenu rouleau de gazon.

Des défis en pagaille !

Lorsque le jardin éphémère est installé, le visiteur ne soupçonne pas les prouesses réalisées par toute l’équipe des Parcs et Jardins. Prouesse de temps : l’installation doit se faire en cinq jours maximum. Autant dire que tout est réglé comme du papier à musique et que chacun, lorsqu’il arrive, sait exactement ce qu’il a à faire. Prouesses végétales aussi : on ne peut pas creuser la place Stanislas. Rien ne peut y être planté au sens propre. Tout doit donc pousser dans un minimum d’épaisseur comme l’extraordinaire prairie fleurie (une soixantaine de centimètres de haut) qui se satisfait d’une couche de terre d’à peine trois centimètres d’épaisseur ! Ou les bambous qui tutoient le ciel avec leur dix mètres de haut, et dont il faut assurer la parfaite stabilité face au vent, alors qu’ils sont en pot !
Certains défis ont déjà payé. C’est notamment le cas des « flashcodes » (les codes QR), lancés l’an dernier et qui ont tout de suite séduits les utilisateurs…et même au-delà puisque même les services du Premier Ministre se sont renseignés sur l’initiative nancéienne !

Des jardins dans le jardin

…ou plutôt des tableaux qui racontent les innovations de Jean Prouvé. Six grands gabions (2 x 2,5 m) rythment l’un des pieds du compas. Remplis de pailles, de bois, de broyage, de poterie ou de gazon, ces gabions évoquent les parois hublots chères à Jean Prouvé. Parfois, la forme du hublot est simplement signifiée par la section ronde des morceaux de bois ou la boule d’une fleur de chrysanthème. Un raccourci du hublot par sa forme : ronde. Plus loin, c’est une bibliothèque (évocation de celle produite avec Charlotte Perriand) dont des plantes ont remplacé les livres. Là-bas, ce sont les chaises standards qui sont matérialisées au sol par des « fresques » florales. Toute la difficulté consiste à renouveler les variétés de ces plantes, à créer la nouveauté, alors que la saison (et ses rigueurs climatiques) reste la même.
Un bassin agrémenté de 27 jets offre un jeu de miroir étonnant. La place devient ciel, Les pavés toiture éphémère d’une structure Prouvé renversée. Des nouveaux angles de contemplation apparaissent, l’œuvre devient totale.

Les Beaux-Arts

C’est une première, et quelle bonne idée ! Un partenariat avec le Musée des Beaux-Arts. Sur la place, des pots ronds tracent une ligne vers l’entrée du musée et invitent le visiteur à poursuivre sa découverte de l’œuvre de Jean Prouvé au musée. La volonté est d’installer un dialogue entre les œuvres originales et leurs interprétations végétales. Tous les mercredis à 15 heures sont également prévues des visites à double voix musée/jardin. Une initiative qui confirme le nom de ce jardin « Jean Prouvé, le végétal dessine le design ».

On aurait pu être sceptique : jardin et Jean Prouvé pouvaient-ils se conjuguer ensemble ? Oui, indéniablement. C’est même l’occasion de porter un nouveau regard sur l’œuvre de ce génial nancéien.

9e jardin éphémère
Place Stanislas, du 29 septembre au 4 novembre, entrée libre de 8h à 22h.