Pour sa 4e édition, Essences & Matières investit le magnifique Palais du Gouvernement à Nancy réunissant les plus grands artisans d’art de la région.
Il est, d’habitude, inaccessible au public. Sauf à l’occasion de quelques événements. Le Palais du Gouvernement à Nancy ouvre exceptionnellement ses portes du 16 au 18 novembre lors de la 4e édition d’Essences & Matières. Un véritable voyage au cœur des métiers d’art : voici ce qui attend les visiteurs en quête de découvertes de savoir-faire.
Après une première édition en 2015 à la salle de la Rotonde de Thaon-les-Vosges, une deuxième à l’Arsenal de Metz, et une troisième au Palais du Tau à Reims, Essences & Matières a démontré que l’univers des métiers d’art était une thématique plébiscitée par le grand public en attirant plus de 6 200 visiteurs lors de sa dernière exposition. À Nancy, la manifestation prend une nouvelle dimension en proposant un nouveau concept : « L’idée est de construire un jeu subtil et raffiné qui mêlera l’élégance de l’ancien et l’énergie du contemporain. Grâce à une mise en scène originale et créative, le public pourra se projeter dans un univers rempli de charme qui illustre parfaitement non seulement les métiers d’art mais l’artisanat : être par la tradition, devenir par l’innovation. Les pièces de nos artisans d’art seront plus que valorisées elles seront projetées dans un environnement répondant aux codes de la décoration actuelle : le visiteur pourra ainsi très facilement se représenter un objet ou l’autre dans son propre intérieur » détaille Bernard Stalter, président de la Chambre Régionale de Métiers et de l’Artisanat du Grand Est.
Comme un showroom
Essences & Matières n’est donc pas un simple salon où différents stands se succèdent. Non, ici le visiteur est immergé dans l’univers des métiers d’art en parcourant un showroom mêlant élégance et modernité. En tout, les créations de vingt artisans du Grand Est seront mises en scène au sein du Palais du Gouvernement. Pour parfaire cette mise en scène magnifique, plus de cinquante artisans et entreprises artisanales de toute la région ont prêté leurs pièces de collection. Tissage, ébénisterie d’art, décoration sur porcelaine, céramique, création de mode, tapisserie, travail du verre, maroquinerie… Plusieurs métiers d’art seront donc représentés : les professionnels seront présents pour rencontrer le public, expliquer leur démarche créative et leur savoir-faire technique, partager avec la clientèle et créer ainsi une démarche commerciale nouvelle fondée sur la pédagogie et l’échange.
Nouveauté de cette 4e édition : un programme entièrement gratuit d’animations, de conférences et de démonstration sera proposé au public pour comprendre, s’interroger et même, pourquoi pas, susciter des vocations. Ce programme, élaboré avec l’association lorraine Be Arti, elle-même composée d’artisans et d’entreprises Métiers d’art, s’adresse aussi bien aux enfants qu’aux adultes (voir p. 11).
Proposé par la Chambre Régionale de Métiers et de l’Artisanat du Grand Est, Essences & Matières a été organisé avec l’aide de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Meurthe-et-Moselle. L’occasion d’unir les forces pour mener à bien ce projet mettant en lumière le patrimoine régional. Car, comme le souligne Bernard Stalter : « L’artisanat d’art est une véritable culture dans le Grand Est. Nous nous devons de l’accompagner, de la faire connaître, de l’inscrire comme une véritable identité régionale. »
Du 16 au 18 novembre. Entrée libre • Le 16 novembre de 14h à 19h, le 17 novembre de 10h à 19h et le 18 novembre de 10h à 18h • Renseignements : crma-grandest.fr
Des artisans d’exception
Parmi les 70 artisans participants à Essences & Matières, 20 seront présents à la rencontre du public. Portraits de six d’entre eux pour les découvrir plus en détails.
Anne-Sophie Cohen Wasler, ébéniste d’art
Elle baigne dans l’ébénisterie depuis son plus jeune âge. Après un CAP d’ébénisterie d’art, Anne-Sophie Cohen Wasler continue sa formation auprès de son père Philippe Wasler. « J’approfondis mes connaissance grâce à mes stages, effectués notamment à l’étranger, en Belgique au musée des Arts Décoratifs à Liège par exemple » explique-t-elle.
En 2009, elle s’installe à son compte en reprenant l’atelier familial à Mazerulles en tant qu’ébéniste d’art et restauratrice-conservatrice du patrimoine mobilier. « Le plus gros de notre métier est la restauration de meuble. Mais nous faisons aussi de la création sur demande de commode, de table, de bibliothèque avec différentes finitions comme la laque, la marqueterie de cuir… » Anne-Sophie Cohen Wasler participe pour la 3e fois à Essences & Matières, « un rendez prestigieux qui permet d’avoir une belle vitrine ».
ateliers-walser.com
Jérémy Tagliaferri, maroquinier
Totalement autodidacte, Jérémy Tagliaferri forme, en 2014, la marque Atelier Clause avec son associé Julien Fortunat. Ces artisans-créateurs ont toujours été séduits par le cuir. Ils se forment aux techniques traditionnelles de la maroquinerie par le biais de livres, de vidéos et aussi grâce à une grande pratique : « Un jour, nous avons commandé notre première peau et nous avons fait des essais. Chaque jour est un apprentissage. »
Sacs à main, bracelets en cuir, petite maroquinerie et objets de décorations : leurs créations conjuguent tendances actuelles et style traditionnel. « Nos peaux proviennent de tanneries françaises et italienne comme pour les plus grandes marques de luxe » précise Jérémy Tagliaferri. Installés à Metz, Essences & Matières est l’occasion pour eux de promouvoir leur savoir-faire à une échelle régionale.
atelierclause.com
Stéphane Prévot, vitrailliste
« À Essences & Matières, il y a une belle sélection de vrais artisans qui viennent montrer leur savoir-faire et présenter des pièces d’exception. C’est aussi l’occasion pour nous de rencontrer un public intéressé par les très belles choses. » Stéphane Prévot est originaire de Nancy. Il a étudié le dessin au Lycée Loritz avant d’obtenir le Diplôme des Métiers d’Art, section vitrail, à l’Ecole des Métiers d’Art de Paris. « Avant cette école, plusieurs stages m’avaient conforté dans l’idée de travailler le verre » souligne-t-il. « Ce qui me plait, c’est le travail de l’agencement des couleurs mais aussi la transparence du verre et le fait de jouer avec la lumière. »
Installé dans son atelier de Domgermain depuis 1994, Stéphane Prévot travaille pour des particuliers sur de la création et/ou restauration de vitraux Art Nouveau mais aussi pour des monuments comme des églises ou des chapelles où il restaure des vitraux anciens.
stefatelier.com/blog
Fleur Pierson, tapissier d’ameublement
C’est sa première participation à Essences & Matières. L’occasion de découvrir cette jeune tapissier d’ameublement : Fleur Pierson est diplômée des Beaux-Arts de Nancy et a poursuit ses études par une année de formation à Neufchâteau et Liffol-le-Grand dont elle obtient son CAP Tapissier d’ameublement. En janvier 2016, elle reprend l’Atelier Déco-Styles à Mirecourt, créé depuis 40 ans et lui faire prendre un nouveau tournant dans sa carrière. « Ma spécialité est la restauration de fauteuils ou de toutes assises en général. Je travaille la garniture et l’extérieur du fauteuil que je recouvre de tissus. Je confectionne également des rideaux ou des têtes de lit pour proposer aux clients un ensemble. »
decostylesblog.wordpress.com
Stéphanie Pétuya, créatrice de literie d’exception
Ce métier est l’histoire d’une transmission. « J’ai tout appris avec une femme artisan matelassé à qui j’ai acheté ma première couette il y a 12 ans. Quand j’ai voulu acheté celle de mon fils, elle m’a dit qu’elle n’en faisait plus et je lui ai proposé de venir la confectionner moi-même avec son aide et elle a accepté » explique Stéphanie Pétuya. Installée en Alsace, cette créatrice de literie d’exception travaille aujourd’hui des matières premières nobles : de la pure laine vierge et du lin de fabrication normande et tissé dans le Nord. « Ma maman était couturière professionnelle en Normandie. Finalement, j’ai aussi appris par mimétisme. » Elle crée des couettes, des oreilles, des matelas nomades, et va même plus loin en proposant une gramme de décoration en feutre. « C’est ma première participation à Essences & Matières et je crois dans le concept de mettre en scène nos produits dans une scénographie innovante. Je pense que le consommateur arrivera plus facilement à s’identifier. »
stephaniepetuya.fr
Sophie Réato, céramiste Raku
En 1999, Sophie Réato se forme auprès d’un professionnel : « Lorsque j’ai touché la terre, ça a été une révélation. » Très vite, elle participe à des salons pour vendre ses créations. Comme à Essences & Matières où elle y expose pour la 4e fois : « C’est un salon avec une belle notoriété qui attire un public de plus en plus averti. » Sophie Raéto fabrique des objets de décoration en céramique sur des thèmes animaliers, floraux, et plus récemment sur des thèmes ethniques japonisants. Elle maîtrise également le Raku, une technique ancestrale coréenne. Elle y associe également le travail du métal pour des créations relevant du luminaire au petit mobilier. « Le métal m’a toujours attirée, mais il fallait une infrastructure plus complexe pour le travailler et aussi des connaissances. Aujourd’hui, je me forme auprès de chaudronniers agricoles dans une constante évolution. »
Page Facebook @sophiereatocreations
Entretien avec Bernard Stalter
Président de la Chambre Régionale de Métiers et de l’Artisanat du Grand Est
& Jean-Paul Daul
Président de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Meurthe-et-Moselle
Combien de professionnels des métiers d’art y a-t-il dans le Grand Est ?
Bernard Stalter : Il y a 4 500 professionnels et 1 000 entreprises dans notre région et l’artisanat d’art représente 7% des actifs à l’échelle nationale. C’est donc un secteur très important de notre économie. La CRMA soutient fortement ces métiers précieux, ils sont une remarquable vitrine de notre patrimoine et des vecteurs d’excellence à travers des titres prestigieux comme les Meilleurs Ouvriers de France. Nous souhaitons valoriser cette qualité, cette intelligence des mains.
Justement, comment les Chambres de Métiers et de l’Artisanat soutiennent les artisans ?
Jean-Paul Daul : L’objectif lors de mon mandat était de donner plus de lumière à ces métiers. Via les salons comme Essences & Matières mais aussi en aidant les entreprises dans leurs démarches administratives, dans leur création de site internet, et en les encourageant vers l’export.
B. S : Fin octobre, au sein d’un espace collectif entièrement scénographié, nous avons 13 artisans du Grand Est, spécialisés dans la restauration du patrimoine, au Salon International du Patrimoine Culturel à Paris. Nous leur apportons des conseils et une aide matérielle sur leur communication, sur des questions marketing…
Des salons comme Essences & Matières sont essentiels pour promouvoir les métiers d’art ?
B. S : Bien sûr ! Il faut faire connaitre nos artisans et sensibiliser le public à ces savoir-faire ancestraux. La force de la CRMA est de proposer différents événements sur tout le territoire. Et c’est grâce aux présidents départementaux et à leurs actions de proximité que l’on arrive à de tels résultats.
La CMA Meurthe-et-Moselle a d’ailleurs aidé à l’organisation du salon.
J-P. D : Nous connaissons mieux le département que quiconque ! Nous sommes aussi soutenus par la Métropole du Grand Nancy, par le Département de Meurthe-et-Moselle et par la ville de Nancy en la personne de Laurent Hénart. Voir ce magnifique Palais du Gouvernement prendre vie avec les métiers d’art, c’est fabuleux.
Comment ont été choisis les exposants ?
J-P. D : La CMA 54 était présente lors de la commission des métiers d’art qui a sélectionné les artisans. Nous les choisissons pour leurs démarches originales et leurs idées innovantes. Je me souviens d’une jeune artisane qui créait des bustes en résine très légers pour les glisser dans les cockpits des avions téléguidées. Ces petites figurines étaient le graal pour les pilotes de ces machines. Je ne savais même pas que ça existait, elle est la seule à faire ça en France, c’est étonnant !
Pourquoi proposer une scénographie digne d’un showroom plutôt qu’un salon traditionnel ?
B. S : Nous nous devons d’être créatifs et innovants. C’est un bonheur d’investir le Palais du Gouvernement et de lui donner vie sans cloisonner les métiers d’art dans des stands. Tous se mélangent pour donner une scénographie exceptionnelle, pour permettre au public de se projeter.
J-P. D : C’est une véritable promenade au cœur de l’artisanat d’art. L’objectif est de proposer un événement fédérateur qui attire le plus grand nombre.
Qui attire également les jeunes avec une programmation dédiée aux scolaires.
J-P. D : Nous invitons plusieurs classes à venir parcourir le salon et à poser des questions aux artisans. Beaucoup de jeunes ne savent pas dans quelle voie s’engager. Et bien souvent, ils ne connaissent pas tous les métiers d’art. Si ce genre d’événement peut susciter des vocations, nous aurons réussi notre pari !
B.S : Rappelons qu’aujourd’hui en France, 700 000 postes dans l’artisanat ne sont pas pourvus. Près d’un million de jeunes sont sans formation et sans emploi. C’est pourquoi la réforme de l’apprentissage est aussi importante car elle permet d’être apprenti jusqu’à l’âge de 30 ans. L’occasion pour les jeunes de trouver leur voie mais aussi de permettre des reconversions professionnelles dans ces métiers-passions. Je crois en l’avenir de ce secteur d’activités : « Être par la tradition, devenir par l’innovation », c’est ma devise. Ça représente bien l’artisanat et les métiers d’art. Propos recueillis par Pauline Overney
Des animations ludiques
SAMEDI 17 NOVEMBRE
10H30 | Conférence
Le cheminement d’une démarche créative : de l’idée à l’objet
avec Be Arti et Florian Jacquemin, designer
Quelles sont les différentes étapes de pensées, de dessins, de prototypes qui permettent d’arriver à l’objectif : le produit fini. Une conférence riche d’échanges et de découvertes qui révèlera l’invisible…
14H00 | Démonstration
Les bijoux de l’atelier Tilin, la dorure d’Emilie
avec l’Atelier Tilin et Emilie Ricou-Latourte
La finesse du geste, la précision de la technique, l’élégance et la délicatesse de la réalisation de la dorure d’un bijou à la feuille d’or.
DIMANCHE 18 NOVEMBRE
10H-12H | Atelier Jeunesse
La gravure
avec Jeanne Picq, graveur
Effectif : 8 à 10 enfants de 6 à 12 ans.
Exprimer sa créativité, découvrir une technique, comprendre le travail d’un artisan d’art : les enfants vont pouvoir s’initier à l’art de la gravure auprès d’un graveur professionnel. Les inscriptions seront ouvertes à partir du samedi matin, auprès de Be arti.
14H-16H | Atelier Adultes
La céramique
avec Céline Blaudez, céramiste.
Travailler la matière et ses différentes formes, composer avec le temps et s’inscrire dans un processus réel de création d’un artisan d’art. Les inscriptions seront ouvertes à partir du samedi matin, auprès de Be arti.
Pour les scolaires
Une action spéciale destination des scolaires et plus particulièrement des élèves de 4e et de 3e, années charnières en matière d’orientation, est également proposée aux collèges locaux. Une occasion ludique et originale de découvrir et appréhender les métiers de l’artisanat d’art, ceux de l’artisanat au sens large mais aussi la voie de l’apprentissage.
Publi-reportage • Photos © DR