Eric Marchal et ses étoiles du progrès

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L’écrivain lorrain, qui vit à Vittel, vient de publier son quatrième roman. « Là où vivent les étoiles », le destin croisé de deux familles exceptionnelles à cheval entre le XIXe et le XXe siècle, période exaltante sous le signe du progrès.

Une belle rencontre de deux personnages hors du commun : c’est le point de départ du nouveau roman d’Eric Marchal. L’un d’entre eux n’est plus à présenter, Gustave Eiffel, jeune ingénieur ambitieux au moment il rencontre Clément Delhorme, né de l’imagination de l’auteur et reflet opposé d’Eiffel. L’un vient de se marier et il est l’aube de la carrière qu’on lui connaîtra, l’autre, un peu plus fou mais tout aussi savant est un pionnier des vols d’altitude en ballon, à l’origine des premiers modèles de prévisions météorologiques.

Richement documenté, la toile de fond qui permet à l’auteur de faire évoluer ses personnages nous emporte d’abord dans l’immensité désertique de l’Andalousie, dans les décors de l’Alhambra à Grenade. C’est là que vit la très romanesque famille Delhorme : une épouse à la beauté fatale, des triplés aux destins étonnants. Le chantier de rénovation de l’Alhambra nous fait toucher du doigt la croyance dans le Dieu progrès qui sera présent tout le long du roman. De la communauté gitane de l’époque aux Neveros qui nous transportent jusqu’aux sommets de la Sierra Nevada pour aller chercher des pains de glaces, les personnages défilent, aussi attachants et colorés que le décor.

EM© Thierry Rateau

« Pionniers de la matière et de l’esprit »

En suivant Clément au fil des pages, le lecteur voyage au gré des chantiers de progrès qui laissent encore leur empreinte aujourd’hui. Comme le Pont Maria Pia au Portugal, puis plus tard la Statue de la Liberté à New-York. Sous les projets ambitieux se dévoilent les difficultés à lever les fonds, établir les plans, convaincre les plus réticents. Dans les ateliers de Bartoldi, Eiffel ou dans les cabinets des premiers photographes, « Là où rêvent les étoiles » est une belle réflexion sur la notion de progrès. Ce progrès scientifique que Clément Delhorme pense devoir n’appartenir à personne, ce progrès concret et utile comme le voit plutôt Gustave Eiffel à part peut-être pour la tour Eiffel, dont on découvre la genèse, celle d’un simple défi technique. Des personnages à l’énergie communicative, qui traversent les épreuves de la vie et la grande histoire de la IIIe république. La foule de détails qui s’égrène au fil des pages n’empêche pas un vrai plaisir de lecture. Eric Marchal réussit à parler de façon presque lyrique de cette science et de cette technique. L’auteur résume ainsi sa démarche : « J’espère avoir reconstitué avec le plus de précision et de sincérité possible cette période qui, en moins de cinquante ans, vit éclore les découvertes et les progrès qui gouvernent encore notre quotidien. Je voulais rendre hommage à toutes ses femmes et tous ces hommes qui en furent les auteurs, pionniers de la matière et de l’esprit. »

Avec ce roman ambitieux de près de 800 pages, Eric Marchal signe son quatrième opus après Influenza (Les ombres du ciel, 2009 ; Les Lumières de Géhenne, 2010), paru en deux tomes aux éditions Anne Carrière, lauréat du prix Carrefour Savoirs 2009. Il est également l’auteur des livres Le Soleil sous la soie (2011) et La Part de l’aube (2013).

Un roman idéal pour bronzer intelligent cet été !

Photo © Thierry Rateau, DR