Les 6, 7, 8 juin 2014 se dérouleront les journées nationales de l’archéologie. Lancées en 2010 par le ministère de la culture, pilotées par l’INRAP (Institut National de Recherches Archéologiques Préventives), celles-ci permettent de rendre accessibles à tous les résultats des recherches en cours et les découvertes archéologiques locales importantes. En France, mille manifestations auront lieu au cours de ce premier week-end de juin sur six cents endroits différents. Musées, chantiers, sites touristiques se mobilisent afin de présenter au public les différentes phases du travail historique : des sites où des fouilles ont pris place aux espaces de conservation présentant leurs trouvailles (objets, restes architecturaux…). Pour cette 5e édition, tout le territoire français sort ses vestiges de l’oubli et la Lorraine n’échappe pas à la règle.
Tour d’horizon des manifestations en Lorraine
En Lorraine, les visiteurs pourront assister à trente-et-un évènements locaux. Rien que sur la Moselle, vingt-et-un rendez-vous sont prévus. Le musée de la Cour d’Or sur Metz est parmi les plus inventifs avec des ateliers, des conférences et des visites guidées. Il y en a pour tout le monde. Les enfants pourront exercer le temps de quelques heures le métier d’archéologue autour d’une reconstitution de fouilles. Les adultes s’intéresseront aux « cultes orientaux à Metz du IIe au IVe siècle » ou à la « nécropole gallo-romaine de la Horgne » lors de visites guidées, rendant plus vivante l’histoire de la Moselle. À Bliesbruck-Reinheim, un parc entier est dédié à l’archéologie et transforme les visiteurs en chercheurs.
En Meurthe-et-Moselle, le musée de l’histoire du fer, à Jarville-la-Malgrange, met en place sur les trois journées un atelier gratuit avec, à la clé, la reconstitution d’un four médiéval produisant du fer. À Mars-la-Tour, des fouilles préventives ont mis à jour un site gallo-romain et des vestiges datant du Moyen-Âge. Les archéologues de l’INRAP et de la Drac présents sur ce chantier viendront exposer les résultats de leurs recherches le vendredi 6 juin. Enfin, au musée Lorrain, Laurent Forelle, archéologue de l’INRAP, prend les enfants de 11 à 14 ans par la main et leur fait découvrir ce qu’est l’archéologie préventive. Une série de conférences y sera également donnée sur les thèmes « L’archéologie de la Grande Guerre » et L’identification des soldats disparus » les 5 et 19 juin. Et puis sur ces trois journées dédiées à l’archéologie, les Vosges ont de belles visites à offrir. Six possibilités parmi lesquelles le site de Grand ou celui des Hautes-Mynes du Thilllot (voir p12).
Focus : trois visites à ne pas manquer pendant les journées nationales de l’archéologie
1 – Les Hautes-Mynes : à l’état d’origine
Situées au Thillot, dans la vallée de la Moselle, les Hautes-Mynes ont traversé les âges et sont restées intactes. Ces anciennes mines de cuivre, établies par les Ducs de Lorraine en 1560, regorgent d’informations sur la manière dont l’exploitation minière se réalisait entre le XVIe et le XVIIIe siècle. Elles ont été abandonnées en 1761 et redécouvertes seulement en 1985. Entre temps, rien n’est venu modifier les lieux et ce qu’ils recèlent. Ainsi, un des plus anciens ensembles de pompage, datant du XVIIIe siècle a été retrouvé dans un des puits de la mine lors des fouilles du site. Les Hautes-Mynes sont connues aussi pour être les premières à utiliser en France de la poudre noire pour faire exploser la roche. Auparavant, les mineurs devaient se contenter de leurs outils : des pointerolles, barres en acier pointues, et des marteaux. Le parcours de ces travailleurs souterrains, le public peut le revivre grâce aux visites organisées toute l’année. Aucun aspect de l’exploitation des mines de cuivre n’est négligé. Les téméraires pourront descendre dans les galeries, des mines Saint-Thomas et Saint-Charles à celle de la Rouge Montagne. La maison des Hautes-Mynes présente une exposition sur la vie des lieux quand ils étaient encore exploités : documents administratifs, outils, machines et autres découvertes archéologiques rendent plus concrète l’histoire des mines. Pour les journées de l’archéologie, le site a aussi organisé des ateliers pour les enfants de 6 à 14 ans. Les techniques de fouilles seront abordées au milieu d’un mobilier archéologique reconstitué. Une manière de se replonger dans le passé, pas si lointain, de la Lorraine. Avis aux jeunes archéologues !
2 – La Tour seigneuriale de Darnieulles : observer des fouilles en cours
La Tour seigneuriale de Darnieulles aujourd’hui fait grise mine. De sa splendeur passée, il ne reste pas grand-chose. Pourtant elle a bien des histoires à raconter et pour cette raison, fait l’objet de toute l’attention de l’université de Lorraine. Chaque année depuis 2012, les lieux sont explorés par un groupe d’une dizaine d’étudiants encadrés par Cédric Moulis, ingénieur d’étude en archéologie médiévale. Pour ce dernier, la Tour a bien plus d’intérêt qu’il ne semble au premier abord : « Elle fait partie d’un ensemble plus grand, une maison forte édifiée entre la fin du XIe siècle et le début XIIe. Son emplacement est stratégique. De cet endroit, les sires de Darnieulles, propriétaires des lieux, pouvaient surveiller au nom des Ducs de Lorraine l’évêque de Metz, alors installé à Épinal ». Les deux campagnes de fouilles précédentes ont permis de connaître les techniques de construction utilisées. Les pierres ont par exemple été posées en épi et à sec afin d’économiser les matériaux et de permettre au bâtiment de respirer. Les ouvriers ont aussi laissé des traces de leurs échafaudages dans les murs : des trous dits « de boulin » (sorte de poutre en bois). Ces marques montrent notamment que la construction de la tour s’est réalisée en une seule campagne. Les 6, 7, 8 juin, le site de Darnieulles ouvre ses portes au public. Les visiteurs verront se dérouler sous leurs yeux des fouilles en direct et ils pourront échanger sur les multiples richesses historiques découvertes ici avec les archéologues présents. L’évêque de Metz a quitté Épinal depuis longtemps, mais la Tour, elle, veille toujours.
3 – Rodemack : un château en cache un autre
En France depuis 2001, tout projet d’aménagement du territoire doit, avant de commencer, laisser la place aux archéologues de l’INRAP afin de diagnostiquer, voire d’explorer la zone de travaux. Cette procédure a permis de sauvegarder bien des éléments de notre histoire : selon Estelle Bénistant, chargée du développement culturel et de la communication INRAP Grand Est-nord, « 90 % des connaissances sur un territoire ont été récoltées grâce à l’archéologie préventive ». Les fouilles du château de Rodemack depuis 2013 sont un exemple de ces chantiers menés par l’INRAP. Sous ce bâtiment datant du XVIe siècle, des restes de fondations d’une place forte des XIVe et XVe siècles ont été mis à jour. En dégageant les plans de l’ancienne forteresse, les archéologues peuvent ainsi déterminer l’évolution du château de Rodemack, qui a subi des démolitions, incendies ou sièges multiples. Verreries, vaisselles en céramique, munitions, le bâtiment actuel était assis sur un trésor. Une pièce frappée à l’image de Charles Quint a même été retrouvée et atteste du passage de l’empereur du Saint-Empire Romain Germanique à Rodemack. Le chantier de fouilles est ouvert au public les 7 et 8 juin et les visiteurs auront droit à deux visites pour le prix d’une. Le village médiéval de Rodemack, aussi appelé « la petite Carcassonne lorraine » est un des cents plus beaux de France.
Tous les renseignements (programmes et horaires) sur les journées nationales de l’archéologie sont sur le site : http://journees-archeologie.fr