Traquer le street art à Nancy est un vrai jeu de piste. Un graffiti, une mosaïque ou un pochoir peut se glisser à chaque coin de rue, sur chaque poteau ou borne électrique. Parcours découverte du street art nancéien.
Flâner dans la cité, laisser son regard errer et enfin, quand la chance est de la partie, découvrir la face cachée de Nancy. « Visiblement, Nancy est une des premières villes où ça a bougé pour le street art, au début des années 1990 notamment, avec des artistes comme Yvain von Stebut », affirme Julien Pesce. Ce dernier connaît bien son sujet. En septembre 2013, il publie « 54#01 – L’Art de rue à Nancy – Volume I ». Nancéien depuis 2005, il a voulu garder la trace de ces œuvres éphémères et les a inventoriées dans son livre. Il faut parfois traîner dans les recoins reculés comme la friche d’Oberlin, sur les rives du canal, pour les apercevoir. Ici, l’art urbain prend de l’ampleur : lettrages et peintures s’accaparent tout l’espace. Sur les murs de bâtiments abandonnés, ceux des enceintes englobant désormais de microscopiques no man’s land, la fine fleur de la scène street art nancéienne a créé des fresques démentes. Smala Crew, Moulin Crew, ces collectifs mélangent les styles : réaliste, humoristique, poétique ou sombre. Les signatures s’entrecroisent. Les personnages de Koga, rappelant l’univers des bandes dessinées de science-fiction américaine, rencontrent ceux plus torturés ou énigmatiques de Ced. Dans cette galerie à ciel ouvert, tout le monde peut s’exprimer, même les anonymes. À quelques encablures de la rue Oberlin, autour de la MJC Bazin, d’autres fresques attendent les promeneurs. Certaines font se tutoyer calligraphie et cubisme. A la bombe aérosol, les graffeurs transforment la grisaille ambiante en un monde coloré et changeant. « Sur Nancy, les styles et les modes d’expression sont très diversifiés. Il y a beaucoup de graffitis, mais il y a aussi d’autres techniques » assure Julien Pesce.
De l’autre côté du canal, le street art fait profil bas et devient plus difficile à saisir. Comme le petit Poucet, Waldo a essaimé ses mosaïques. Ces petites figures multicolores semblent tout droit sorties de jeux vidéo vintage. Autour de la porte de la Kraffe, dans les ruelles de la vieille ville, près de la place des Vosges, le street art joue avec ceux qui le recherchent. Le bestiaire de Miyo, du pingouin à la girafe, côtoie le personnage moustachu et grassouillet de Monsieur et la catcheuse masquée de Madame. Les collages de Koda Ma, eux, nous emmènent dans le Japon de Miyazaki. L’artiste emprunte d’ailleurs son nom à ces esprits de l’arbre, aux yeux ronds et à l’allure de fantôme, qui hantent la forêt de « Princesse Mononoké ». Dans le quartier de la gare, des tags marquent le territoire des rails. Les signatures Na Crew ornent les murs entourant le chemin de fer. Dans la gare même, les voyageurs peuvent parfois tomber nez à nez avec un train customisé « art de rue ». Mais le street art reste fidèle à lui-même : insaisissable. À la faveur des intempéries ou des effacements, son visage se modifie. Les œuvres des street artistes laissent la place à d’autres. Un conseil pour vous, dénicheurs de graffitis occasionnels, pour vos prochaines expéditions : ouvrez l’œil, et le bon !
Jusqu’au 26 avril, la Filoche à Chaligny accueille l’exposition « 54#02 – Préquelle », un avant-goût du prochain livre de Julien Pesce, et met à l’honneur des street artistes nancéiens : Gilbert1, Joris, le Moulin Crew, Petit Fantôme, Coqualane, etc. Renseignements sur le site de la Filochewww.la-filoche.fr
Le livre « 54#01 – L’Art de rue à Nancy –Volume I » appartient à un projet plus vaste d’inventaire du street art par département. Le premier volume sur Nancy est disponible dans les librairies L’Autre Rive et le Hall du Livre sur Nancy. Il est aussi possible de le commander sur le site www.projetdiese.com
Pour plus d’info sur Julien Pesce www.ilographisme.fr